Chutes de hauteur : la CSST sonne l’alarme

Marie Gagnon

Championne toute catégorie des accidents graves, l’industrie de la construction s’est de nouveau retrouvée sous les feux de la rampe à l’occasion de la publication du rapport d’enquête sur la mort de Benoît Collin, au début novembre. Rappelons que le 2 novembre 2009, l’apprenti couvreur travaillait à la réfection du toit d’une résidence, à Pointe-Claire, lorsqu’il a perdu pied. Après une chute de 6,4 mètres, son corps s’est empalé sur une tige métallique. Son décès a été constaté sur place.

 

« La membrane d’étanchéité masquait l’ouverture de la cheminée et rien n’indiquait la présence de ce vide, relate Alexandra Reny, porte-parole de la Commission sur la santé et la sécurité du travail (CSST). La membrane a cédé sous le poids du travailleur, entraînant sa chute. Le rapport d’enquête indique que monsieur Collin portait un harnais de sécurité, mais qu’il n’était pas attaché au moment de l’accident. L’enquête a en outre révélé des lacunes quant à la gestion de la sécurité lors de ces travaux. »

 

Alexandra Reny rapporte que depuis le 1er janvier 2009, 70 % des arrêts de travaux et 58 % des constats d’infractions signifiés sont liés aux chutes de hauteur. Toujours en 2009, 638 travailleurs ont été blessés lors d’une chute de hauteur, dont 74 uniquement sur l’île de Montréal. Elle souligne toutefois que, depuis l’implantation du Plan d’action construction en 1997, la tendance est à la baisse. Depuis 2000, le nombre d’accidents a diminué de 20 %, malgré une hausse de 50 % des heures travaillées, c’est dire.

 

« En plus de poursuivre l’application de la politique de tolérance zéro à l’égard des dangers liés aux chutes, aux effondrements, aux travaux à proximité de lignes électriques et aux substances prouvées dangereuses pour la santé, comme l’amiante et la silice, le Plan d’action construction 2010 veille à ce que la gestion de la prévention ne reste pas lettre morte sur les chantiers, signale la porte-parole de la CSST. En d’autres mots, cela signifie que les employeurs fautifs devront s’assurer que leur programme de prévention se traduit par des actions concrètes. »

 

En rejoignant la notion de diligence raisonnable, qui devient un outil de prévention intéressant pour les employeurs, cette nouvelle mouture du Plan d’action construction marque une approche innovatrice en matière de gestion de la santé et de la sécurité du travail. Cependant, il vise avant tout à provoquer un changement de culture et à faire en sorte que la gestion de la SST devienne un volet à part entière de la production sur le chantier, pas seulement un document administratif.

Les employeurs du secteur de la construction ont tout intérêt à mettre en œuvre les dispositions du Plan d’action 2010. En effet, la CSST a récemment doublé les amendes qu’elle impose aux employeurs négligents. Au cours des 30 dernières années, l’amende pour une première infraction a varié entre 5 000 et 20 000 $. Depuis le 1er juillet dernier, cette fourchette va de 10 000 à 40 000 $. Et à compter du premier janvier prochain, les amendes tripleront, pour passer de 15 000 à 60 000 $.

 

« Les amendes n’avaient plus l’effet dissuasif recherché, note Alexandra Reny. Pour continuer à infléchir le nombre d’accidents, même si la situation s’est grandement améliorée au fil des ans grâce aux campagnes de prévention, nous n’avions pas d’autre choix que d’augmenter les amendes. Désormais, celles-ci feront par ailleurs l’objet d’une indexation annuelle. »