Convertir un vieux couvent en centre multifonctionnel

21 novembre 2018
Par Marie Gagnon

Un projet qui fait la part belle à l’innovation : la conversion de l’ancien couvent des Ursulines de Roberval.

Recycler un édifice religieux en un centre multifonctionnel logeant à l’enseigne de la modernité. Voilà le défi auquel se sont attaqués des promoteurs robervalois lors de la conversion de l’ancien couvent des Ursulines, l’automne dernier. Au terme d’un chantier de 11 mois visant à remodeler et à agrandir le bâtiment datant de 1882, l’ancien couvent a été transformé, moyennant 10 millions de dollars, en un complexe professionnel moderne et fonctionnel.

 

L’idée n’est pas nouvelle. Au Québec, plusieurs édifices religieux désaffectés ont ainsi échappé aux pics des démolisseurs et profitent aujourd’hui d’une deuxième vie. Cependant, pour mener à bien de tels projets, il faut plus que des voeux pieux. Plusieurs dimensions, dont la volumétrie de l’édifice, sa fenestration, son enveloppe et sa structure, doivent en effet être prises en compte pour en assurer la réussite.

 

Transformation extrême

« Faire du neuf avec du vieux, c’est toujours un défi, note Paul Charette, gestionnaire de projet pour Unibec. Sauf qu’ici, l’édifice a été laissé à l’abandon à la suite d’un incendie en 2002. La Ville l’a racheté, mais elle n’a assuré qu’un minimum d’entretien. Pendant des années, l’eau s’est infiltrée par la toiture. Le bâtiment était dans un état de dégradation important. On a fait un curetage complet et on n’a conservé que les planchers et les murs de maçonnerie structurale. »

 

De quoi faire rêver Pascal Lamy, ingénieur de projet pour CTD Construction. « Construire à l’intérieur d’une coquille vide, c’est assez stimulant, dit-il. On doit faire bien attention à la séquence des travaux et ça demande beaucoup de coordination. Par exemple, on voulait ouvrir une cage d’ascenseur pour y pelleter les débris. Mais il fallait d’abord s’assurer de la qualité structurale. Les murs extérieurs sont en maçonnerie massive, on a donc dû les consolider avant de procéder. »

 

Ingéniosité novatrice

Restait à remodeler l’édifice pour qu’il réponde à sa nouvelle vocation. Le vieux couvent de 3 000 mètres carrés (m2) n’abritera pas seulement des bureaux administratifs et professionnels. En façade, il logera en outre une pharmacie dans une nouvelle construction de 1 022 m2 sur trois niveaux, ainsi qu’une salle de spectacle sous les combles. Ces aménagements nécessitent toutefois la création de grandes portées.

 

Par ailleurs, la mise à nu de la structure révèle une redondance de poutres et de colonnes, témoignant des très courtes portées de l’époque. Comme il faut aménager une aire ouverte au premier niveau, les concepteurs doivent faire preuve d’imagination. Pour donner forme au concept et atteindre les portées prescrites, ils retirent quatre colonnes et les remplacent par des poutres de format W760 x 136 mm longues de 12 mètres.

 

Toujours pour les besoins d’aménagement de la pharmacie, des passages doivent être créés afin de faire communiquer le nouveau bâtiment avec l’ancien. Dans cette optique, certaines fenêtres et l’entrée principale ont été démantelées et leur ouverture agrandie. « En ouvrant, il fallait soutenir toute cette brique, car le plancher du deuxième niveau est appuyé dessus, souligne Pascal Lamy. Pour consolider la structure, on a boulonné des linteaux d’acier au mur. Chaque ouverture a ensuite été renforcée par un cadre rigide en béton. »

 

Défis inédits

Autre défi de taille : l’aménagement d’une salle polyvalente sous les combles. Cette fois, les portées ne sont pas les seules à limiter le concept à aire ouverte, la hauteur libre aussi. En effet, l’espace sous la toiture est de deux mètres seulement, alors qu’il en faut 2,5 de plus. Comme il est hors de question de rehausser le toit, il faut aller gruger de l’espace au niveau inférieur en éliminant le plancher.

 

Le but étant d’éliminer deux lignes d’axes de colonnes – soit quatre colonnes en tout –, la solution consiste à installer deux autres super poutres W760 x 136 de 15 mètres de long pour soutenir la toiture, à conserver certains piliers et à les doubler en les soudant à de nouvelles colonnes, puis à démolir le plancher. Rien de bien novateur jusqu’ici, sinon que les poutres ont dû être montées avec un palan et glissées par la fenêtre.

 

« Quand on travaille dans l’existant, ça demande beaucoup de flexibilité, commente Pascal Lamy. Des fois, on pense avoir la solution, mais quand on arrive sur le terrain, on s’aperçoit que ce n’est pas possible ou que ça coute trop cher. Il faut aussi être créatif, pas seulement sur le plan de l’ingénierie, mais aussi au chantier. »