Pratiques et innovations
Par François G. Cellier
L’aluminium devrait être une option envisagée pour rénover ou reconstruire nos ponts routiers. C’est ce qui ressort d’une étude publiée par l’ingénieur ontarien, Scott Walbridge, et par l’ingénieur québécois et président de MAADI Group, Alexandre de la Chevrotière, dont la firme se spécialise exclusivement dans la conception et la construction de structures d’aluminium. Commandé par l’Association de l’aluminium du Canada (AAC), ce rapport traite essentiellement des vertus propres à ce matériau, qui, en Europe, est utilisé depuis longtemps dans la construction de ponts routiers.
Applicable aux ponts routiers québécois
Au Québec, des milliers d’infrastructures routières pourraient comporter des composantes d’aluminium. À titre d’exemple, les tabliers en aluminium allégeraient considérablement la charge morte d’un pont et, de ce fait, augmenteraient sa capacité portante. Les ponts routiers pourraient aussi être dotés de passerelles piétonnières et pour vélos en aluminium.
Des solutions aux faiblesses de l'aluminium
Ce matériau résiste à la corrosion et peut être extrudé. Il coûte plus cher à l’achat, mais il ne requiert aucun entretien et est durable. Toutefois, s’il y a variation de température, il se contracte et se dilate deux fois plus que l’acier. « Pour solutionner cette problématique, il faut dimensionner les joints d’expansion en conséquence », indique Alexandre de la Chevrotière. Les structures mixtes constituées d’aluminium et de béton commandent également la prudence, car ces deux matériaux réagissent différemment aux écarts de température.
L’aluminium est en outre plus sensible à la fatigue. Celle-ci se manifeste généralement dans les zones appelées « zones de concentration de contraintes », où se trouvent les soudures. Le soudage par friction malaxage corrige en grande partie ce défaut. L’aluminium ne comporte également qu’un faible module d’élasticité, l’une des raisons qui ont contribué à son impopularité.
Afin de pallier cette faiblesse, il faut augmenter l’inertie des sections d’une structure. « Ses poutres en I seront plus hautes d’environ 50 %, en comparaison de celles en acier. Cela permettra d’obtenir une déflection identique aux éléments d’acier », assure Alexandre de la Chevrotière. L’entreprise qu’il dirige a récemment conçu un pont piétonnier en aluminium pour le Parc Equestre Blainville. Elle en a assemblé un autre, plus tôt cette année, destiné à la Ville de Brossard.
Un matériau mal connu des ingénieurs québécois
La plupart des ingénieurs en structure québécois connaîtraient encore mal l’aluminium, un autre frein à l’expansion de ce matériau. Également, les règles canadiennes de calcul pour concevoir des ponts d’aluminium ont brillé par leur absence. Mais tout cela pourrait changer avant longtemps.
Une formation obligatoire sur l'aluminium ?
Depuis l’automne 2011, la nouvelle section 17 a été inscrite dans la norme CAN/CSA S6-06 du Code canadien. Denis Beaulieu, ingénieur chez SNC-Lavalin, en a dirigé la rédaction. Ce dernier a récemment développé une formation relative à cette norme, qui s’adresse, depuis cet automne, aux ingénieurs et architectes dans tout le Canada. L’AAC lui en a donné le mandat. Il restera à intégrer une formation obligatoire sur ce matériau dans les facultés de génie.
Il n’existe à ce jour qu’un pont routier fait d’aluminium au Canada, soit le pont d’Arvida, le plus long du monde construit en 1950 à Jonquière. Sa structure était plus vulnérable à la corrosion galvanique, car elle n’était pas adéquatement protégée. De nos jours, cette problématique a été réglée. Précisons que le ministère des Transports du Québec (MTQ) concocterait, actuellement, un projet de tablier de pont en aluminium qui serait construit à Saint-Ambroise.
Cet article est paru dans l’édition du jeudi 15 novembre 2012 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !
