La construction et les dépassements de coûts

9 janvier 2012
Par Sophie Marchand, M.Sc, CGA

Combien de fois le dépassement de coûts de projets de construction publics ont-ils fait la manchette ? Tout projet d’affaires repose sur de nombreuses hypothèses et en tenir compte dans l’évaluation d’un budget est certainement complexe. C’est pourquoi des modèles financiers doivent être développés sur mesure pour prendre en compte toutes ces hypothèses.

 

Grands ou petits, les projets de construction devraient tous être évalués de la même façon et considérer l’ensemble des scénarios envisageables dès le départ. D’abord, cela permettrait une meilleure évaluation des coûts d’un projet et ensuite, cela permettrait de prévoir des mesures de rechange au cas où les choses ne se passeraient pas comme prévu.

 

L’objectif de ce billet n’est pas de minimiser la complexité liée à l’évaluation d’un projet de construction mais plutôt d’expliquer sommairement comment intégrer l’analyse des scénarios lors d’un tel exercice à partir d’un exemple très simple.

 

Un exemple concret

Imaginons donc que vous êtes en charge de la rénovation complète d’une école aux prises avec des problèmes de moisissures. En tant qu’entrepreneur général, vous demandez alors des soumissions à des experts. À la question, à combien s’élèvent les coûts de ce projet, votre expert vous répond : « C’est difficile à évaluer… Ça dépend de ce qu’on va trouver en ouvrant les murs… Ça dépend aussi de ce qui a causé les moisissures. Avant d’avoir défait les murs, on ne peut pas vraiment se prononcer…  À la base, ça devrait coûter 500 000 $ mais ça pourrait aller jusqu’à 1 500 000 $. » Qui accepterait une soumission aussi imprécise ? La plus grande erreur serait d’accepter avec en poche un budget de 500 000 $, en réfutant le fait que ce budget pourrait tripler.

 

Bien sûr, avant d’accorder le contrat à votre expert, vous lui aurez d’abord demandé ce qui justifierait une telle augmentation des coûts de la soumission de base. Votre expert vous expliquerait alors ce qu’il pourrait découvrir et dans quelle mesure cela pourrait affecter les travaux. Vous le questionneriez également sur les probabilités que chacun des scénarios énoncés se réalise vraiment.

 

Supposons maintenant que votre expert vous mentionne que le coût du scénario de base (infiltrations d’eau passées) est de 500 000 $, que les coûts du scénario B (problèmes de condensation chronique) pourraient s’élever jusqu’à 1 000 000 $ et que les coûts du scénario C (infiltrations d’eau actuelles) pourraient aller jusqu’à  1 500 000 $. Vous lui demanderiez alors quelles seraient les probabilités d’occurrence des scénarios B et C, compte tenu de l’information que l’on détient sur l’état actuel du bâtiment ou sur le type de projets similaires qu’il a réalisés dans le passé. S’il vous répondait que le scénario B a 50 % de chances de survenir et le scénario C 10 % des chances, vous pourriez alors établir votre budget comme suit :

 

SCÉNARIO DE BASE : 500 000$ * 100 % = 500 000 $
SCÉNARIO B : 500 000 $ additionnel * 50 % = 250 000 $
SCÉNARIO C : 500 000 $ additionnel * 10 % = 50 000 $
BUDGET TOTAL = 800 000 $

 

En acceptant une telle soumission, vous vous prépareriez mentalement à devoir débourser 800 000 $ mais vous sauriez néanmoins que le coût réel pourrait varier entre 500 000 $ et 1 500 000 $. Vous auriez également pris soin d’étudier des solutions alternatives au cas où les scénarios  B et en C se concrétiseraient.

Il en va de même pour tous les grands projets de construction. Il ne s’agit pas de détailler toutes les étapes du projet et de les chiffrer. Il faut également évaluer le potentiel de risque et les solutions de rechange pour chacune des hypothèses possibles.

 


Pour plus de détails, consultez le blogue de Sophie Marchand : Mon Cher Watson. De plus, pour toute question ou commentaire, n’hésitez pas à communiquer avec l’auteure de cette chronique par courriel.