Construction résidentielle : Des marchés à risques en transformation

7 janvier 2016
Jean Garon

La construction résidentielle bat un peu de l’aile au Québec, sauf dans le marché des appartements locatifs et celui des résidences pour personnes âgées. 

En fait, tout n'est pas noir, l'industrie montre certaines vulnérabilités auxquelles les promoteurs et constructeurs doivent s’adapter pour mieux répondre aux besoins des marchés de l’habitation en transformation.

 

Prudence et circonspection semblent les nouveaux mots d’ordre qui s’imposeront aux investisseurs du secteur résidentiel au cours des prochaines années. Selon la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), « les perspectives du secteur canadien de l’habitation sont exposées à certains risques à l’échelle nationale et mondiale ». Les plus grands risques sont ceux liés à l’évolution future du prix du pétrole et aux niveaux élevés d’endettement des ménages.

 

Cela étant dit, l’économiste principal à la SCHL pour le Québec, Kevin Hughes, est d’avis que « l’accélération graduelle de l’économie québécoise stimulera quelque peu la demande de logements en 2016 et 2017 ». Selon lui, le resserrement du marché de la revente et le vieillissement de la population donnera un élan à la construction résidentielle, surtout dans le segment des logements collectifs comme les appartements et les résidences pour personnes âgées.

 

En ce moment, les économistes de la SCHL estiment qu’il existe des signes de surévaluation allant de modérés à élevés dans les marchés résidentiels de Montréal et Québec. Ce résultat reflèterait surtout « l’effet modérateur des facteurs économiques et démographiques qui ne soutiennent pas entièrement les prix observés ».

 

Ainsi, le recul et l’essoufflement de certains marchés devraient inciter les promoteurs et constructeurs à rechercher d’autres débouchés que les maisons individuelles et les copropriétés en se tournant vers la construction d’autres types de logements, notamment des logements locatifs.

 

Assurément, les stocks de copropriétés affichent déjà une certaine saturation qui oblige les investisseurs à offrir leurs unités invendues en location.  Les chefs analystes à la SCHL David L’Heureux et Francis Cortellino prennent pour exemple la région métropolitaine de Montréal (RMR), où les conditions de marché se resserrent, et plus particulièrement celui des copropriétés qui se montre de plus en plus favorable aux acheteurs vu l’abondance de l’offre de propriétés neuves et existantes.

 

Résultat : les mises en chantier de copropriétés diminueront en 2016 et 2017 pour se situer à environ 7 000 par année, soit un nombre de 40 à 45 % inférieur au sommet de 2011-2012. À Québec, les prévisions sont aussi à la baisse pour les copropriétés, qui passeront de 1 050 mises en chantier en 2015 à 700 puis à 600 respectivement les deux prochaines années. 

 

Le taux d’inoccupation des copropriétés offertes en location dans la région de Montréal s’élevait à 3 % en 2015, et à 4 % à Québec. Celui du marché locatif traditionnel (appartement), lui, continuera d’augmenter pour atteindre 4,4 % à Montréal et 5 % à Québec d’ici 2017.

 

Plus spécifiquement sur l’île de Montréal et ses banlieues, le plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) favorisera la construction d’habitations de haute densité, en particulier les projets conçus à proximité des réseaux de transport en commun. Dans certains secteurs comme celui de Ville-Marie, la copropriété neuve concurrencera la copropriété existante.

 

Comme l’indique l’analyste principale de marché à la SCHL, Geneviève Lapointe : « Le ralentissement des mises en chantier de copropriétés attendu dans la plupart des secteurs de la RMR de Montréal tempérera la hausse prévue des stocks en 2016 et 2017. Néanmoins, à Ville-Marie, vu l’ampleur du nombre d’unités en construction, le nombre de copropriétés invendues est appelé à croître au cours des prochaines années. »

 

Par ailleurs, les analystes de la SCHL prévoient que les mises en chantier de maisons individuelles, jumelées et en rangée continueront de ralentir dans le Grand Montréal et seront concentrées dans les secteurs de banlieue où il y a davantage de terrains disponibles, tels que Mirabel et Longueuil. À Québec, la construction de maisons individuelles est en baisse partout en périphérie, sauf sur la rive sud. Les maisons jumelées et en rangée seront également en baisse en raison des stocks accumulés.

 

En ce qui concerne les prix des habitations, la SCHL prévoit une croissance annuelle de l’ordre de 2 % pour les deux prochaines années au Québec. Dans la région montréalaise, le prix moyen s’établirait à environ 345 500 $ en 2016 et à 353 000 $ en 2017. Compte tenu des conditions des marchés de l’offre et de la demande  pour les stocks d’habitations neuves et existantes dans la région, les spécialistes de la SCHL prévoient des marchés (acheteurs/vendeurs) équilibrés dans les segments d’habitations unifamiliales et des plex, et un marché favorable aux acheteurs dans le segment de la copropriété.

 

À Québec, la croissance des prix demeurera faible, autour de 1 et 1,5 % d’ici 2017, avec un prix moyen qui oscillera entre 270 000 $ et 274 000 $.

 

Au chapitre des résidences pour personnes âgées, l’offre de places sera nettement en hausse au cours prochaines années, avec l’accroissement du nombre de ménages dans la tranche d’âge des 75 ans et plus, surtout celles localisées près des services dans les grands centres urbains.

 

Cet article est paru dans l’édition du jeudi 10 décembre 2015 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !