Les enjeux du secteur génie et voirie au Québec

28 novembre 2012

Tour d’horizon des enjeux du secteur génie civil et voirie avec la directrice de l’Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec (ACRGTQ), Me Gisèle Bourque.

Par Rénald Fortier

 

Redressement du réseau routier, réhabilitation des infrastructures urbaines, construction d’installations de production et de distribution d’énergie… Derrière l’efferverscence qui règne dans le milieu québécois du génie civil et de la voirie, se profilent des enjeux importants pour la bonne marche, tant actuelle que future, de ce secteur d’activité. Rien de surprenant donc à ce que ces mêmes enjeux se reflètent dans les dossiers figurant tout au haut de la pile parmi ceux portés ou défendus par l’ACRGTQ, qui représente 2 500 entreprises employant près de 40 000 travailleurs. À commencer par la nécessité de redorer le blason d’une industrie qui a été fortement secouée et discréditée par les allégations de corruption, de fraude et de collusion ces dernières années.

 

« On ne dit pas que tout est plus blanc que blanc, mais il reste que nous représentons la majorité des entrepreneurs qui sont honnêtes et qui respectent les lois et les règlements en vigueur au Québec », indique d’entrée de jeu Me Gisèle Bourque, directrice générale de l’ACRGTQ. Voilà le message qu’entend donc continuer de marteler l’organisme au sein de l’industrie, mais aussi auprès du grand public. Sans oublier d’insister également sur la bonne santé et la productivité de son secteur d’activité.

 

Un message que l’association véhicule notamment par l’entremise de vidéos-capsules visant à démontrer la fierté de ses entrepreneurs membres d’avoir construit le Québec et de continuer à le construire, sinon à le reconstruire. Et à mettre en relief les accomplissements du secteur du génie civil et de la voirie, largement déclassés par les attaques lancées à l’encontre de l’industrie.

 

L’ACRGTQ ne s’est pas arrêtée seulement à rebâtir l’image projetée par son secteur d’activité, elle a aussi mis en place l’an dernier un code d’éthique à l’intention des entrepreneurs réunis sous son parapluie. « Comme nous ne sommes pas un organisme à caractère disciplinaire, il n’y a évidemment pas de sanctions qui s’y rattachent, précise sa directrice générale. C’est un code moral auquel adhèrent nos membres automatiquement et qui, validé par des experts en la matière, lance le signal que les malversations n’ont pas leur place dans notre milieu. »

 

Aux yeux de Gisèle Bourque, il est encore trop tôt pour mesurer l’impact des efforts déployés par l’ACRGTQ pour valoriser le secteur génie civil et voirie. « Comme l’industrie de la construction est malmenée depuis longtemps déjà, observe-t-elle, les retombées positives d’une telle campagne ne se feront pas sentir du jour au lendemain. Mais nous avons bon espoir que notre message fasse son chemin. D’autant qu’avec les travaux de la Commission Charbonneau, la lumière va se faire peu à peu. »

 

D’ailleurs, tout comme elle l’avait fait auparavant pour la création de l’unité permanente anticorruption, l’ACRGTQ avait accueilli favorablement la mise sur pied de cette commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction à l’automne 2011. Et elle se réjouit aujourd’hui d’y avoir obtenu le statut de participant. Pour l’ACRGTQ, l’objectif doit être de retirer du marché les individus et les organisations malveillantes qui violent les principes d’éthique et de saine concurrence reconnus au Québec et ailleurs au pays. « Dans ce contexte, dit Gisèle Bourque, cet exercice [la tenue de la Commission Charbonneau] doit rendre les lettres de noblesse à une industrie qui souffre d’une image ternie par la allégations de collusion et de corruption. »

Objectif Nord

Toujours au niveau des initiatives gouvernementales appuyées par l’ACRGTQ, difficile de passer outre la mise en oeuvre du Plan Nord. Car les membres de l’association seront appelés à mettre joliment l’épaule à la roue dans la foulée de ce vaste développement nécessitant la construction de routes, de voies ferrées et d’infrastructures maritimes. Sans oublier les occasions d’affaires qui s’ouvriront aux entrepreneurs oeuvrant dans le secteur minier et de l’énergie.

 

Voilà pourquoi l’ACRGTQ demeure constamment à l’affût de l’évolution du Plan Nord et qu’elle voit, conjointement avec des spécialistes en la matière, à l’organisation de conférences pour aider ses membres à bénéficier des retombées de ce gigantesque projet. Elle a aussi entrepris d’accompagner au nord du 49e parallèle les entrepreneurs qu’elle représente, une première menée sur le mégachantier hydroélectrique de la Romaine.

 

« Nous avons un avocat-médiateur chevronné sur place qui voit aux relations entre les patrons et les syndicats, et aussi Hydro-Québec, explique Me Bourque. C’est un service essentiel qu’on devait offrir à nos membres étant donné l’ampleur de ce projet réalisé en région éloignée. Nous visons ainsi à maintenir la paix sociale sur le chantier, mais aussi la productivité. »

 

Impossible d’aborder la question des relations patronales et syndicales sans glisser tout de go sur la Loi éliminant le placement syndical et visant l’amélioration du fonctionnement de l’industrie de la construction, sanctionnée par l’Assemblée nationale en décembre dernier. Et de prendre le pouls des attentes de l’ACRGTQ envers son application.

 

« Nous avions appuyé le projet de loi [no 33] déposé à l’automne 2011, indique Gisèle Bourque, parce qu’il permettait aux employeurs de récupérer le droit de gérance quant à l’embauche des travailleurs, et donc de rééquilibrer le rapport de force entre les patrons et les syndicats. Tout comme nous étions d’accord pour que la Commission de la construction du Québec procède avec efficience à la mise en place d’un système de référence de la main-d’oeuvre. »

 

Reste que l’ACRGTQ a encore des préoccupations à l’égard de ce nouveau système, notamment en ce qui concerne les travaux d’urgence. « Dans un secteur comme le nôtre, c’est une question importante, et on veut s’assurer qu’il n’y ait pas de délais si de tels ouvrages doivent être exécutés le soir ou les fins de semaine, indique Gisèle Bourque. C’est pourquoi il faudra alors que la CCQ ait une équipe en place pour que les travaux d’urgence puissent être immédiatement pris en charge. »

 

Par ailleurs, si l’ACRGTQ ne peut que se réjouir des investissements massifs consentis à la remise en état du réseau routier québécois, elle entend veiller à ce qu’ils ne chutent pas à plus ou moins brève échéance. En 2016, ce sont près de 27 milliards de dollars qui auront été investis dans la modernisation du réseau depuis 2007, plus 2,7 milliards en provenance des partenaires du MTQ. Dépassé cet horizon, on ignore cependant à quelle hauteur ils se situeront.

 

« Nous allons demeurer vigilant, conclut Gisèle Bourque, car il est important que les budgets alloués à la conservation des actifs et à l’amélioration du réseau soient maintenus, mais également connus à l’avance. Parce que cela permet notamment aux entrepreneurs de mieux planifier à moyen et à long termes leurs besoins en équipement et en maind’oeuvre. »