Lanauco : se concerter au lieu d’imposer

27 avril 2012
Par Benoit Poirier

Implication des employés dans l’évaluation des niveaux de risques, dans la détermination des types de non-conformité et dans l’élaboration des sanctions possibles. Formation, sensibilisation, rétroaction et mises à niveau périodiques. Engagement de tout un chacun à respecter un cadre de vie sécuritaire et suivi régulier. Autant d’éléments qui ont permis à Lanauco de maintenir, ces dernières années, un dossier quasi impeccable en matière de santé et sécurité au travail et qui lui a valu une reconnaissance du milieu.

 

« Je pense que ç’a fait un peu notre réussite. En ce sens que ça n’a pas été imposé, mais que ç’a été décidé tous ensemble. On est quand-même dans un domaine d’activité qui est assez à risque. On n’aiguise pas des crayons… », lance Janie Mailhot, responsable, administration, communications et en charge des ressources humaines et du dossier SST pour l’entreprise, localisée à Saint-Alexis-de-Montcalm, dans Lanaudière.

 

Un secteur d’activité à hauts risques

Œuvrant dans le domaine de la construction, du développement et de la maintenance de lignes électriques et de communications, l’entreprise se spécialise principalement dans l’installation et l’enlèvement de poteaux et d’ancrages. Une grande majorité de ses contrats sont ainsi réalisés à proximité de lignes électriques de distribution.

 

Ses procédures de travail doivent conséquemment concorder avec les normes de sécurité qu’imposent et que demandent à valider ses clients, dont Hydro-Québec et Bell. En plus de ces exigences contractuelles, Lanauco s’est jointe à une mutuelle de prévention, ce qui la met, à titre d’employeur, au défi d’accroître toujours davantage sa performance en SST.

 

Ajoutons à cela la réglementation en SST, dont le projet de loi C-21, qui est venu modifier le Code criminel canadien, en 2004, et dont la vis a depuis été resserrée pour responsabiliser toute personne qui supervise des travaux. Enfin, il s’agit d’une entreprise « qui veut avoir une pérennité dans le temps et qui souhaite conserver sa main-d’œuvre », souligne Janie Mailhot qui, avec ses deux frères et peut-être éventuellement sa sœur cadette, assurent la relève active de l’entreprise familiale, fondée en 1987.

 

Toutes ces raisons ont incité l’entreprise à adopter des mesures de sécurité visant à protéger l’intégrité de ses quelque 50 employés et à minimiser au maximum les risques inhérents à leur champ d’activité.

 

« On a décidé d’être proactif avec les demandes contractuelles. Plutôt que de faire le minimum, on a choisi d’en donner un peu plus. Au final, ça nous paye, parce qu’on a de moins en moins d’accidents sur nos chantiers. Et si on parle d’incidents, c’est mineur. C’est vraiment à notre avantage », souligne Janie Mailhot

 

Des mesures simples, pratiques et efficaces

Le virage s’est déroulé il y a une dizaine d’années. L’entreprise a d’abord procédé à une restructuration afin de créer des postes de superviseur de chantier pour voir à ce que tout se déroule dans les règles de l’art. Ils s’assurent que les directives sont respectées, de l’assiduité dans le port des équipements de protection individuel (EPI) et effectuent des audits sécurité dans lesquels sont relevées les non-conformités. Au moins cinq audits sécurité sont réalisés chaque semaine et chaque équipe est auditée au moins une fois par mois.

 

L’évaluation des degrés de risques, la détermination des types de non-conformité et l’élaboration des sanctions ont été effectuées en concertation. A suivi, l’adoption de mesures et de procédures, qui ont été intégrées au manuel qualité de l’entreprise, de même qu’au code de vie, que chaque employé est invité à signer chaque année. Ceci donne à l’employé l’occasion de réviser les consignes tout en permettant d’accroître le sentiment d’appartenance, soutient Janie Mailhot.

 

S’y trouvent également inscrites les sanctions prévues en cas de non-respect des normes. Elles peuvent aller d’une lettre écrite suivi d’une rencontre avec un administrateur, à une suspension de trois ou cinq jours sans solde, voire au congédiement pur et simple « ce qui ne s’est jamais produit ». Ont aussi été prévus des moyens de renforcement positifs, tels qu’un programme de reconnaissance et le tirage de prix.

 

Les superviseurs assistent à une réunion de production hebdomadaire lors de laquelle sont établis les objectifs et les priorités de la semaine en matière de qualité de travail et de sécurité. Le sujet fait de plus l’objet d’une rencontre saisonnière, quatre fois l’an, à l’intention de tous les employés.

 

Ces réunions offrent l’occasion, en plus de faire la mise à jour concernant l’entreprise et les contrats qui sont dans la mire, d’effectuer un rappel des procédures liées à la SST, de souligner les bons coups d’employés ou de discuter d’incidents survenus et des mesures édictées pouvant être améliorées.

 

L’entreprise a par exemple installé des valves de retenue sur toutes ses rétrocaveuses pour empêcher que le mat ou la flèche entre en contact avec une ligne électrique en cas de rupture d’un boyau hydraulique. De même en ce qui concerne les protecteurs qui sont fixés sur le haut des poteaux pour limiter leur contact avec une ligne électrique.

 

Un travailleur qui dirige un poteau lors d’une implantation dans un trou doit porter des gants en caoutchouc moyenne tension pour prévenir toute électrocution. Lorsqu’une implantation est terminée, les travailleurs doivent utiliser, pour retirer les protecteurs à poteau une petite tige isolante qui relie le protecteur à poteau à une corde pour éviter que cette corde n’entre en contact avec une ligne électrique.

 

Des résultats positifs non sans embûches

« Depuis que l’équipe a mis l’accent sur la SST, on n’a pas relevé, particulièrement au cours des dernières années, de non-conformités graves ou très graves ; uniquement des fautes mineures », rapporte Janie Mailhot.

 

Autres éléments qui ont joué en faveur de ce résultat, c’est le fait que, dans ce domaine, il y a moins une culture de témérité, ce qui est plus fréquent, croit-elle, du côté de travailleurs qui voguent d’un chantier à un autre. Ce qui n’est pas le cas des employés de Lanauco. La majorité d’entre eux y sont depuis 5, 10, voire 20 ans.

 

Demeure que certains employés ont, au début, manifesté une certaine réticence, particulièrement en ce qui concerne le port des lunettes protectrices et des gants en caoutchouc, qui s’ajoutent au casque et aux bottes, ainsi que, chez Lanauco, aux salopettes ignifuges et, au besoin, aux protecteurs auditifs.

 

« Mais en sensibilisant, en trouvant les bons arguments et en continuant d’aller de l’avant, ç’a marché. Et on a fait en sorte que ça devienne un automatisme. En frappant sur le clou, c’est devenu tellement un automatisme que, maintenant, ce serait anormal de planter un poteau entre les phases pas de gants. Il n’y a pas un gars qui planterait sans ses gants ! Maintenant, on ne voit jamais ça », affirme Janie Mailhot.

 

Un incident impliquant une rétrocaveuse et qui n’avait heureusement pas fait de blessé a incité la direction de l’entreprise à faire preuve de fermeté afin d’assurer la sécurité des travailleurs, tout comme l’intégrité des équipements.

 

« On a développé des tolérances zéro si, par exemple, le mat d’un camion était levé sans les stabilisateurs. Ça n’a pas causé de grands émois, mais il y en a qui ont eu droit direct à la sortie de secours de trois jours de congé. On est passé directement aux avertissements. On en a eu deux, mais ç’a fait voie d’office dans l’entreprise », explique-t-il.

 

Avantageux et à petit prix

Outre la mise à niveau de certains de ses équipements, tel que l’ajout d’une mise à la terre et de valves de retenue à la machinerie neuve et l’investissement en terme de temps, l’adoption des nouvelles procédures n’a que peu affecté le budget de l’entreprise.

 

« Ce n’est pas considérable, l’investissement, par rapport à ce que ça apporte », soutient Janie Mailhot. Entre autres, le deuxième prix Gestion Santé-sécurité que remettait à Lanauco l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec (ACRGTQ) et l'ASP-Construction, en janvier dernier. En 2011, ce prix avait été décerné à Construction Demathieu & Bard (CDB), qui œuvre dans le domaine du génie civil.

 

Mais la meilleure récompense réside peut-être dans le bilan lui-même, dans lequel figurent maintenant peu d’incidents. « On a toujours à faire de la prévention et du renforcement, mais de moins en moins », termine Janie Mailhot.

 


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