Marianne Langlois – Une pionnière dans le dynamitage

19 juin 2013
Par Christian Chaloux

Marianne Langlois est une pionnière dans l’industrie de la construction. La travailleuse exerce le métier de boutefeu, une profession qui compte seulement sept femmes au Québec. Elle est d’ailleurs la première femme boutefeu à être embauchée sur un chantier d’Hydro-Québec, soit celui de La Romaine sur la Côte-Nord.

 

Le cheminement de Marianne Langlois est teinté d’acharnement et de persévérance pour atteindre ses buts. Pour celle qui a été pendant 18 ans dans le monde de la distribution de journaux et de magazines dans son Abitibi natale, le monde de la construction n’était pas parmi ses choix de carrière à la sortie de l’adolescence.

 

Choisir la construction sur le tard

C’est à 36 ans qu’elle entame sa nouvelle carrière comme manœuvre dans le monde de la construction. Les multiples choix qui s’offrent dans la profession l’incitent à essayer bien des chantiers avant d’établir son choix. « J’ai commencé en 2005 et avant de suivre une formation, je voulais savoir vers quoi m’aligner. À cet âge-là, je cherchais un métier que j’aimerais », dit-elle.

 

Elle a été embauchée comme manœuvre spécialisée sur les ponts, conductrice de skytracts, tracé des traits de scie sur les ponts, de la signalisation sur les chantiers routiers, aide-poseur dans les aqueducs ainsi que journalier dans le bâtiment et les toits. Puis, un contrat sur un chantier pétrochimique lui fait découvrir un métier qui a attiré son attention, agent de prévention en santé et sécurité dans la construction.

 

« Quand j’étais chez Ultramar, j’ai découvert ce métier. Je me suis informée pour connaître la formation et les préalables. Je devais avoir 10 000 heures d’expérience sur les chantiers, relate-t-elle. En 2006, je commençais dans la construction. J’avais à peine accumulé 600 heures. Je devais alors me trouver un métier où les heures tournent. »

 

 

Marianne Langlois exerce le métier de boutefeu, une profession qui compte seulement sept femmes au Québec.

 

 

Devenir boutefeu

Le métier de boutefeu devient donc une option intéressante pour Marianne Langlois. Les heures sont nombreuses, la demande est forte et il est possible d’aller travailler sur les grands chantiers comme La Romaine, un autre de ses rêves.

 

Mais pour que sa formation soit payée, elle devait accumuler 3 000 heures dans la construction. Une étape supplémentaire à franchir, ce qu’elle s’appliqua à faire. Elle est finalement entrée à l’école pour le métier de boutefeu foreur en 2008 pour compléter une formation de 900 heures, soit un an.

 

La porte arrière

Avec son diplôme en poche, elle retourne dans l’industrie de la construction, mais réalise rapidement que le métier de boutefeu, très physique, n’est pas facile à percer pour une femme. « Je n’étais pas capable de trouver de l’emploi comme boutefeu. J’étais une femme et pour les employeurs, c’est souvent synonyme d’un paquet de problèmes. Je leur disais de m’essayer, mais rien n’y faisait. Même mes représentants syndicaux disaient que c’est difficile de placer une femme, et tout le monde faisait leur possible pour moi », explique Marianne Langlois. Pendant ce temps, elle continue d’être manœuvre sur différents chantiers.

 

Après un an de recherche sans succès, elle choisit de suivre une nouvelle formation dans l’injection de coulis. Cette avenue lui a permis de travailler pour les grandes compagnies qui embauchent également des boutefeux. « Je n’étais pas capable d’entrer par la grande porte, alors j’ai choisi la petite porte arrière. Les grandes compagnies allaient me voir travailler dans l’injection de coulis et j’aurais peut-être ma chance dans le dynamitage », explique-t-elle.

 

Les bons choix

Cette formation lui a permis d’être embauchée sur le chantier de La Romaine. Après une semaine sur place, ses patrons apprennent qu’elle est également boutefeu, et le transfert s’est naturellement effectué. Depuis ce jour, elle travaille dans le dynamitage tout en réalisant l’un de ses rêves de travailler sur l’un des plus gros chantiers actifs au Québec.

 

 

Sa formation dans l’injection de coulis lui a permis d’être embauchée sur le chantier de La Romaine, où elle a rapidement pu commencer à travailler dans le dynamitage tout en réalisant son rêve de travailler sur l’un des plus gros chantiers actifs au Québec.

 

 

Marianne Langlois a maintenant 10 000 heures en banque. Elle a envoyé sa candidature pour suivre la formation d’agent de prévention en santé et sécurité en construction. Ce qui représente ultimement son objectif de carrière dans la construction.

 

Une femme parmi des hommes

Avant la construction, Marianne Langlois avait déjà une longue expérience dans un métier traditionnellement occupé par des hommes, soit la distribution des médias. Pendant 18 ans, elle a vu le marché des médias imprimés perdre des parts de marché. Son emploi devenait plus précaire. « Ma vie a tout le temps été sur la route, de 18 ans à 36 ans. Dans la distribution, les emplois étaient coupés et coupés. À la fin, je me suis dit que j’irais ailleurs, où les salaires sont meilleurs », explique-t-elle.

 

Le milieu masculin n’était pas une nouveauté pour elle. « J’ai été élevée avec six gars. J’ai été élevée dans le public aussi, mes parents avaient des commerces. Pour moi, c’est normal. J’ai du plaisir avec les gars de chantier », dit-elle. Son truc est qu’il ne faut pas essayer de s’imposer, car c’est là que ça peut se gâter. « Il faut vraiment s’adapter aux personnes avec lesquelles on travaille. Il faut passer par-dessus certaines situations, c’est sûr », dit-elle. La compagnie qui l’emploie compte d’ailleurs plusieurs femmes sur le chantier.

 

Son conseil pour les femmes qui seraient intéressées par le métier de boutefeu est qu’elles soient conscientes que c’est difficile physiquement. « Le métier exige de la force physique, précise-t-elle, à de multiples reprises ».

 


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