Voir Vert - Automne 2010

Favoriser le réemploi

Récupérer des produits et matériaux de construction, de rénovation et de démolition en vue de leur recyclage, c’est bien, très bien même. Non seulement sont-ils ainsi détournés de l’élimination, mais aussi trouvent-ils une nouvelle vie utile. D’où l’importance donc de maintenir les efforts déployés en ce sens ces dernières années au Québec, voire de les accentuer.

N’empêche que c’est la filière du réemploi qui demeure la plus écologique lorsque les produits et matériaux s’y prêtent. Pourquoi ? Eh bien, parce que leur réutilisation dans leur application d’origine n’exige pas de transformation, donc ni de dépense énergétique ni d’émissions de GES. Force est d’admettre cependant que le réemploi représente aussi l’avenue la plus difficile à emprunter. À telle enseigne que cette pratique est encore très marginale dans le milieu du bâtiment institutionnel, commercial et industriel en sol québécois. Pour l’heure, elle demeure le plus souvent le fait de professionnels du bâtiment ou d’entrepreneurs ayant un réflexe environnemental très bien aiguisé.

Il est vrai que trouver des composantes de bâtiment usagées n’est pas une mince tâche. Il faut savoir où chercher, ce qui n’est déjà pas une évidence, et les astres doivent être bien alignés : les produits ou matériaux usagés des uns doivent être disponibles dès lors que s’expriment les besoins des autres. Parce que ceux qui en démantèlent ne peuvent généralement les entreposer, sinon pas longtemps, tout comme ceux qui en cherchent d’ailleurs.

Devant ce constat, Constructo a décidé d’offrir une solution inédite aux différents acteurs du milieu du bâtiment concernés par le réemploi. C’est ainsi qu’il a développé le Carrefour 3RV, accessible sur le portail voirvert.ca. Développé avec le soutien du 3RMCDQ (Regroupement des récupérateurs et recycleurs de matériaux de construction et de démolition du Québec) et de Recyc-Québec, cet outil électronique se veut le point de rencontre entre l’offre et la demande pour des produits et matériaux récupérés.

Là où il pourra faire la plus grande différence, à mon avis, c’est en fournissant aux concepteurs de projets une plate-forme centrale pour exprimer à l’avance leurs besoins. Un appel à tous qui améliorera à la fois leurs chances de dénicher les produits ou matériaux recherchés et de faire coïncider le moment de leur démantèlement avec celui de leur réinstallation. Et donc d’éviter de les remiser.

Le Carrefour 3RV en est encore à ses premiers balbutiements ; nous commençons à peine à en faire la promotion. Bien sûr, nous sommes conscients qu’il ne deviendra pas un incontournable du jour au lendemain. Il faudra que changent des habitudes profondément ancrées dans le milieu pour qu’on en vienne à intégrer davantage de composantes usagées dans de nouveaux projets. Tout comme la déconstruction devra être facilitée en la prévoyant dès la conception d’un bâtiment.

Mais il faut bien partir de quelque part, n’est-ce pas ? Et nous croyons que notre outil permettra à plus ou moins brève échéance de favoriser le réemploi de produits et de matériaux de construction. L’enjeu en vaut certainement la chandelle.

Anik Girard
Directrice générale et éditrice