Le pont Pierre-Laporte, un exploit du génie québécois

22 avril 2013
Par Justin Dupuis

Le 6 novembre 1970, le gouvernement de Robert Bourassa inaugurait le pont Pierre-Laporte, la première structure soutenue par des câbles à fils parallèles au pays.

C'est en 1961 que le gouvernement québécois décide de faire construire ce nouveau passage, tout juste à côté du pont de Québec, ce dernier étant devenu beaucoup trop petit pour accommoder le grand nombre de voitures qui traversent quotidiennement le fleuve Saint-Laurent.

 

La construction de l'énorme ouvrage, qui demeure le plus long pont suspendu au pays, aura nécessité quatre années.

 

Un pont suspendu, la meilleure option

Gérard Desgagné, ingénieur et chef des services du Service de la conception des structures à la Direction des structures du ministère des Transports du Québec (MTQ), explique que vu l'importance de l'ouvrage à réaliser, le choix d'un pont suspendu était l'option la plus viable.

 

« C'était trop large pour un pont conventionnel, dit-il. Pour l'époque, c'était la solution toute désignée, à la fois du point de vue technique et du point de vue économique. »

 

Le projet, qui aura coûté 50 millions $, était impressionnant. La structure métallique supportant le tablier du pont s'étend sur une longueur de 1 040 mètres et est accrochée, à un intervalle de 12 mètres, aux câbles porteurs grâce à quatre câbles de suspente d'un diamètre de 4,8 cm. La travée centrale du pont (668 mètres) est composée de 24 tronçons de 195 tonnes. Chacun des câbles porteurs, de 62 centimètres de diamètre, est composé de près de 12 600 fils d'acier et ils sont reliés à deux massifs d'ancrage, installés sur les falaises de part et d'autre du fleuve. Près de 85 000 mètres cubes de roc ont dû être excavés afin d'installer ces deux cubes de 115 200 tonnes métriques. Tout ça sans compter les piliers et les pylônes du pont, ces derniers faisant à peu près la même hauteur, à marée haute, qu'un édifice de 35 étages !

 

L'ampleur de l'ouvrage, un exploit en soi

Bien que le pont Pierre-Laporte n'ait pas nécessité d'innovations particulières en construction ou des matériaux hors du commun à l'époque, M. Desgagné précise que l'ampleur du projet le rendait exceptionnel.

 

« Il a été fabriqué avec des matériaux qu'on utilise encore dans ce genre d'ouvrage, explique-t-il. Ce n'était pas vraiment une innovation, des ponts suspendus avaient déjà été construits ailleurs au pays, mais en termes techniques, de conception et de méthodes de calculs, compte tenu de l'ampleur de l'ouvrage, c'était un exploit. » 

 

En termes techniques, de conception et de méthodes de calculs, compte tenu de l'ampleur de l'ouvrage, la construction du pont Pierre-Laporte était un exploit.

 

C’est d’autant plus vrai, poursuit Gérard Desgagné, que ce sont surtout des entreprises québécoises qui ont exécuté les travaux.

 

« Je dirais que l'innovation était plutôt à ce niveau. Les ingénieurs et constructeurs québécois qui ont réalisé le projet n'avaient pas forcément fait des ouvrages de cette ampleur-là. Il y avait le pont de l'Île-d'Orléans qui datait des années 1930, mais là nous étions dans des portées extrêmement grandes pour l'époque. Le défi était considérable », de dire l'ingénieur.

 

Et si c'était à refaire ?

Pour des raisons économiques et techniques, si le tout était à refaire aujourd'hui, le pont Pierre-Laporte serait sans doute remplacé par un pont à haubans, comme le pont Papineau-Leblanc, à Montréal.

 

Si c’était à refaire aujourd'hui, le pont Pierre-Laporte serait sans doute remplacé par un pont à haubans, comme le pont Papineau-Leblanc (photo). Source photo commons.wikimedia.org (licence creative commons / auteur Blanchardb)

 

« Un pont suspendu, c'est un câble porteur qui supporte le tablier. Il passe au-dessus des pylônes, mais on est obligé de faire d'immenses massifs d'ancrage pour retenir les câbles. Le pont à haubans ne requiert pas de massifs d'ancrage, il coûte donc moins cher et il est plus facile à construire. Pendant les années 1960, la construction d'un pont à haubans de la longueur du pont Pierre-Laporte aurait été techniquement impossible, mais depuis 20 ans, la portée de ce type de pont a beaucoup augmenté », explique Gérard Desgagné.

 

Plusieurs entreprises ont participé au chantier du pont Pierre-Laporte. La conception a été assurée par les entreprises Demers, Vaudry, Gronquist et Parsons Transportation Group. La construction a, pour sa part, été réalisée par plusieurs groupes (Janin Construction a réalisé les piliers et la travée suspendue, Dominion Bridge, les pylônes et Beaudet-Marquis, les massifs d'ancrage).

 

 

 

Équipe de projet du pont Pierre-Laporte

Donneur d'ouvrage : Ministère des Transports du Québec (MTQ)

Conception : Demers, Vaudry, Gronquist et Parsons Transportation Groupe

Construction : Janin Construction (piliers et travée suspendue), Dominion Bridge (pylônes) et Beaudet-Marquis (massifs d'ancrage)