Peut-on inscrire une hypothèque légale pour des travaux de décontamination ?

4 septembre 2013
Par Me Alexandre Lacasse

Droit et construction - La chronique de Dufresne Hébert Comeau

 

Une chronique du cabinet Dufresne Hébert Comeau - La jurisprudence portant sur la question de savoir si des travaux de décontamination d’un terrain peuvent être considérés comme des « travaux de construction » ou de la « fourniture de matériaux » au sens de l’article 2726 du Code civil du Québec est relativement rare.

 

En 2008, la Cour supérieure avait décidé qu’un entrepreneur qui effectue des travaux de décontamination de sols déjà excavés, sans par la suite ramener les sols décontaminés sur le site pour remblayer l’immeuble d’où ils ont été extraits, ne peut avoir droit à l’hypothèque légale, puisque ces travaux ne visaient pas l’immeuble mais plutôt des biens meubles, c’est-à-dire les sols contaminés déjà excavés et transportés à l’extérieur du terrain pour procéder à leur décontamination.

 

Par contre, dans l’affaire CS Terrec inc. c. Renaud-Prescott, 2013 QCCS 1301, la Cour supérieure a décidé que des travaux de décontamination pouvaient donner ouverture à une hypothèque légale lorsque l’entrepreneur procède à l’excavation des sols contaminés, pour ensuite procéder à leur décontamination et finalement les ramener sur le site et les réintégrer à l’immeuble.

 

Bref, le seul fait de débarrasser un terrain des sols contaminés en excavant et en enlevant les sols ne donnerait pas ouverture à l’hypothèque légale, qui pourrait seulement être inscrite lorsque l’entrepreneur intègre à l’immeuble de nouveaux matériaux non contaminés répondant aux normes environnementales en vigueur.

 

Cela démontre que la notion de « travaux de construction » au sens de la loi est en constante évolution et doit s’adapter aux changements et aux évolutions qui surviennent dans le domaine de la construction. Autrefois, seule l’érection d’un bâtiment pouvait donner ouverture à l’hypothèque légale. Maintenant, la jurisprudence accepte que d’autres travaux, par exemple la construction d’un terrain de stationnement ou d’un chemin d’accès, puissent donner ouverture à l’hypothèque légale, lorsque ces aménagements constituent un accessoire essentiel à l’usage de l’immeuble. 

 

En matière de sols contaminés, la loi ou la réglementation municipale peut interdire certains usages d’un immeuble lorsque les sols sont contaminés. Les travaux de décontamination peuvent donc être considérés comme un accessoire essentiel à l’usage de l’immeuble.

 

Par ailleurs, il existe une présomption à l’effet qu’un avis de contamination publié contre un immeuble en vertu de la Loi sur la qualité de l’environnement est susceptible d’avoir un impact négatif sur la valeur de l’immeuble. Puisque les travaux de décontamination ont pour effet de rendre l’immeuble apte à servir à son usage, il en découle une plus-value apportée à l’immeuble par ces travaux.

 

Nous pouvons donc conclure que des travaux de décontamination peuvent donner ouverture à une hypothèque légale. Il faut toutefois examiner attentivement les circonstances précises de chaque cas pour s’assurer que les conditions élaborées par la jurisprudence sont rencontrées.

 


Cette chronique constitue une source d’information générale. Pour toute question plus précise sur le sujet ou pour faire part de vos commentaires, nous vous invitons à communiquer avec l’auteur de cette chronique : Me Alexandre Lacasse, par courriel à alacasse@dufresnehebert.ca ou téléphone au 514 331-5010.


Dufresne Hébert Comeau Avocats

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