Un complexe hôtelier conçu à partir de plastique recyclé

7 juin 2021
Par Anthony St-Pierre

La firme d’architecture britannique Margot Krasojević Architecture a présenté une proposition audacieuse pour résoudre les problèmes de pollution de l’océan Indien, soit la construction d’un complexe flottant de luxe au large des côtes australiennes, fabriqué à partir de déchets.

L’objectif est de concevoir un hôtel flottant au large des côtes, la durabilité figurant au premier plan des critères de conception. Le projet fera également la part belle aux énergies renouvelables.

 

L’hôtel proposera une série de chambres compartimentées et des terrains pour la pratique du camping. Les douches utiliseront de l’eau de mer filtrée et distillée pompée sur le site à l’aide de l’énergie solaire.

 

Les premiers visiteurs pourraient être accueillis au début de 2025.

 

Protéger l’écosystème

L’hôtel flottera au sud du territoire australien, où une augmentation de la pollution de plastique a endommagé les écosystèmes de l’archipel des Cocos (Keeling), piégeant et tuant des bernard-l’ermite, lesquels font partie des crustacés constituant une part importante des environnements tropicaux et dont le déclin pourrait avoir un impact significatif sur les écosystèmes environnants.

 

Un complexe hôtelier conçu à partir de plastique recyclé. Crédit : Margot Krasojević Architecture

 

La conception a évolué pour devenir une ile artificielle en plastique océanique. Un logiciel de simulation a été utilisé pour comprendre le mouvement et la migration des déchets plastiques les plus imposants, transportés à travers les océans par des gyres océaniques.

 

Margot Krasojević Architecture a ainsi développé une infrastructure visant à atténuer l’enjeu de l’accumulation de déchets plastiques océaniques. Le logiciel de simulation des courants océaniques a créé une cartographie de l’accumulation de la plus forte densité de déchets plastiques, laquelle a servi de point de départ pour comprendre comment les collecter et les valoriser de manière constructive, dans la réalisation d’une ile artificielle d’habitation. Ces amas de polluants océaniques ainsi que leur collecte et leur filtrage sont les principaux critères de conception impliqués dans la localisation et l’évolution de l’ile.

 

Une ile en constante évolution

Le concept de l’hôtel doit évoluer continuellement comme une structure autoréparatrice. Le bâtiment se développera à partir des plastiques jetés et ensuite capturés à travers ses filtres. Pour ce faire, des bras gonflés rassembleront et déposeront les plastiques afin qu’ils soient placés dans des faisceaux de mailles, agissant ainsi comme des dispositifs de flottaison. L’idée est inspirée d’une équipe néerlandaise qui a cherché à utiliser différents matériaux récupérés pour créer un terre-plein, soit une étendue artificielle de terre acquise sur la mer par remblaiement.

 

L’ile sera composée de sacs remplis de mailles de plastiques océaniques récupérés, comme des bouteilles ou des pneus ; ceux-ci seront ensuite tissés pour créer une décharge flottante. La zone sera ancrée au fond de l’océan, tandis que le sable et le limon seront déposés sur les dispositifs de flottaison en plastique récupéré.

 

Une toile tissée de végétaux

L’idée est de rendre la zone hospitalière pour nourrir les palétuviers dont les racines poussent autour des sacs en plastique remplis de mailles, en cimentant ceux-ci pour créer une structure stable. Des mangroves ont également été utilisées pour prévenir les inondations, celles-ci capturant ou piégeant les sédiments, autoconstruisant ainsi un mur grâce à leurs racines qui, en gonflant, absorbent l’eau et empêchent l’ile de chavirer ou de couler. La croissance de celle-ci, afin de devenir habitable, est donc directement reliée à celle des végétaux.

 

Un complexe hôtelier conçu à partir de plastique recyclé. Crédit : Margot Krasojević Architecture

 

Un élément intéressant du projet consiste en une structure plissée de sangles entrelacées, fabriquée à partir de treillis de fibres de béton ensemencées et biodégradables. Ces « tentacules » sont libérés au contact de la montée des eaux. Ils se dilatent et se gonflent dans la houle venant en sens inverse en absorbant l’eau, créant ainsi une barrière artificielle piégeant les sédiments et absorbant le trop-plein d’eau.

 

Ce sont les racines de la mangrove qui constituent le gilet de sauvetage de l’ile en cas d’urgence, car elles permettent l’étalement des sédiments piégés, créant ainsi des terres artificielles, presque comme une bouée gonflable. Chaque tentacule entièrement immergé se dilate et tombe sur le suivant, construisant un mur temporaire empêchant l’eau d’inonder l’ile tout en la soutenant en cas de dommage. Une fois la tempête terminée, les tentacules se vident. À l’aide de pompes alimentées par des panneaux solaires, l’eau est redirigée hors de l’ile et rejetée dans l’océan Indien. Les tentacules se dilatent avec la pression de l’eau amoindrie, permettant à l’ile de flotter.

 

Cette toile imbriquée agit comme une structure ouverte en capturant les sédiments. Elle fait office de filet en piégeant ceux qui s’y logent afin qu’ils puissent s’accumuler en profondeur et en densité. Cela permet ainsi aux mangroves de pousser et à la sous-structure de pollution plastique de prendre de l’ampleur, tout en amortissant les vagues tel un brise-lames.

 

Source : Margot Krasojević Architecture