Collaboration et innovation sur le chantier du campus de Polytechnique

3 avril 2024
Par Isabelle Pronovost

Au cours des prochaines années, Polytechnique agrandira et rénovera son campus situé sur le mont Royal, un chantier complexe où contraintes réglementaires et défis techniques stimulent et enthousiasment l’équipe du projet.

Polytechnique Montréal se lance dans un ambitieux projet de développement, de modernisation et de verdissement de son campus, avec un premier projet évalué à 350 M$. Le chantier comprend trois grandes phases. Il y aura d’abord l’agrandissement du pavillon J.-Armand-Bombardier, dont la moitié des locaux actuels appartiennent à l’Université de Montréal, et le réaménagement d’une partie des espaces extérieurs. Dans un deuxième temps, ces locaux seront libérés, pour ensuite faire l’objet de travaux de réaménagement. Dans la troisième phase, les personnes qui occupent l’arrière du pavillon principal — inauguré en 1957 — déménageront dans la partie réaménagée, ce qui permettra de rénover les blocs F et G du pavillon.

 

Des contraintes réglementaires stimulantes

Pour l’agrandissement du pavillon, les diverses règles qui régissent le site ont engendré des défis importants en matière de conception. Le Règlement sur le développement, la conservation et l’aménagement du campus de la montagne de l’Université de Montréal et des écoles affiliées (20-052) impose notamment des critères stricts quant à la hauteur altimétrique des bâtiments, qui correspond dans ce cas-ci à cinq étages. Un problème pour l’équipe architecturale qui doit dissimuler les équipements électromécaniques. « L’utilisation du revêtement de lamelles de Terracotta nous a permis de les intégrer au volume de façon architecturalement intéressante, pour éviter que les éléments électromécaniques ressortent sur le toit et qu’ils soient très visibles », résume Geneviève Riopel, architecte associée chez DMA architectes.

 

Geneviève Riopel, architecte associée chez DMA architectes. Crédit : Yves Lacombe

 

Outre l’ajout d’une aile au pavillon J.-Armand-Bombardier, Polytechnique souhaitait relier ce dernier au pavillon principal. Or, il est interdit de créer des passerelles ou passages extérieurs. « Les professionnels ont travaillé fort pour trouver une manière de connecter ces deux pavillons par un chemin souterrain, tout en créant des milieux de vie et pas juste un tunnel sombre qui sert de transit », raconte Laurence Aubin-Steben, cheffe de secteur — Planification et gestion des espaces à Polytechnique. Ils ont par ailleurs profité de cette construction tout en longueur pour y aménager un laboratoire d’hydraulique, qui nécessite l’installation d’un circuit de bassins, canaux, pompes et réservoirs. « C’est une façon innovante de partir d’un enjeu de règlement, mais finalement, cela a été bénéfique pour le programme », ajoute-t-elle. Mentionnons que le toit de ce passage souterrain sera végétalisé et servira de traversée verte entre le campus et le mont Royal. Des puits de lumière permettront quant à eux d’y faire entrer la lumière naturelle.

 

Des travaux complexes à exécuter

La création de ce lien souterrain implique une excavation en sous-oeuvre, ce qui signifie l’installation de plusieurs structures temporaires pour soutenir le bâtiment, incluant des pieux forés. Une excavation complexifiée par le fait que l’institution est située à flanc de montagne et que le projet se déroule là où le roc est le plus superficiel (parfois à seulement 50 centimètres du sol), mais aussi tout près de bâtiments existants. « Le premier défi, c’est d’identifier le type de roc, le type de travaux qu’il faut faire dans ce roc-là, quelles sont les méthodes qu’on doit utiliser et quels sont les contrôles qu’on a besoin d’établir », explique Hazem Al-Saedi, chef de secteur — Projets majeurs à Polytechnique.

 

Hazem Al-Saedi, chef de secteur — Projets majeurs à Polytechnique. Crédit : Bonnallie Brodeur

 

Par « contrôles », il fait notamment référence aux sismographes qui mesureront les vibrations engendrées par le microdynamitage. Si les seuils acceptables sont dépassés, les travaux pourraient être interrompus et des ajustements devraient être proposés aux méthodes de travail. Parmi les autres défis, il y a celui de raccorder les nouveaux systèmes à ceux qui sont déjà en place, encore en bon état. « Dans une perspective de développement durable, on essaie de récupérer ce qui peut être réutilisable.

 

Mais il y a des enjeux parce que les systèmes existants dépassent la zone des travaux en tant que telle », précise-t-il. Il sera donc complexe de faire ces raccordements sans affecter les secteurs adjacents. Le chef de secteur aux Projets majeurs fait aussi remarquer que plusieurs des services de Polytechnique, comme l’électricité et l’eau, proviennent de l’Université de Montréal, ce qui demande une étroite collaboration avec ce partenaire.

 

De nombreux intervenants impliqués

Les travaux concernant le pavillon J.-Armand-Bombardier devraient commencer à l’automne 2024, sous réserve d’avoir obtenu les autorisations requises. La première étape consistera à déplacer tous les services souterrains afin de libérer l’empreinte de l’agrandissement. « Il y a beaucoup de sous-traitants qui ne sont pas nécessairement sous la responsabilité de l’entrepreneur général parce que ce sont des fournisseurs de services, dont le gaz et les télécoms. On a des dizaines de services qu’il faut coordonner ensemble », indique Hazem Al-Saedi.

 

Laurence Aubin-Steben, cheffe de secteur — Planification et gestion des espaces à Polytechnique. Crédit : Gracieuseté

 

Les ouvriers pourront ensuite procéder à l’excavation de masse, suivie d’une excavation fine et d’une démolition sélective. S’ensuivront l’érection de la structure, la pose de l’enveloppe extérieure, l’installation de services mécaniques et électriques, la finition intérieure, etc. Une fois la nouvelle aile terminée, des travaux de rénovation seront entrepris à l’intérieur de l’ancienne partie du bâtiment. La fin du chantier de cette première phase est prévue pour 2027-2028.

 

Le projet fait appel à un nombre important de professionnels de tous les domaines : « En plus des domaines d’architecture, de paysage et d’ingénierie de bâtiment, on travaille avec des biologistes, avec des experts en géothermie, avec des spécialistes en gestion de matières résiduelles, avec des spécialistes pour faire des études en vent, des études de vibration, champs électromagnétiques, acoustique, hygiène industrielle, foresterie, circulation, etc. », énumère Laurence Aubin-Steben. « Surtout le client, Polytechnique, et tous les représentants sont vraiment très impliqués dans le projet et c’est ce qui en fait une réussite selon moi. Nous avons une belle synergie, beaucoup de communication », ajoute Geneviève Riopel. Une collaboration qui emballe aussi Hazem Al-Saedi : « J’ai 22 ans d’expérience dans des projets et c’est la première fois dans ma carrière que je participe à un projet qui regroupe autant de spécialités ! »

 

ÉQUIPE DE PROJET
  • Architectes : consortium NFOE + DMA + Provencher_Roy
  • Architectes de paysage : Projet | Paysage
  • Ingénierie électromécanique : consortium gbi + EXP
  • Ingénierie civile et structure : EXP