[Au tribunal] Résiliation pour cause : l’importance de suivre la procédure

2 septembre 2020
Par Antoine Gamache, avocat

La Cour supérieure a récemment rappelé dans l’affaire Theodore Azuelos consultants en technologies (TACT) inc. c. CHU de Québec - Université Laval[1] l’importance pour le donneur d’ouvrage de suivre scrupuleusement la procédure de résiliation prévue au contrat le liant au prestataire de service lorsque celui-ci souhaite résilier le contrat intervenu avec un fournisseur.

Faits

Un appel d’offres est lancé par le CHU de Québec - Université Laval (le « CHU ») afin de conclure un contrat pour la numérisation des dossiers des patients archivés dans l’un de ses trois sites. À la suite de cet appel d’offres, le contrat est octroyé à Theodore Azuelos consultants en technologies (TACT) inc. (« TACT »).

 

L’article 13.03 b) confère au CHU le droit de résilier le contrat en raison d’un manquement de TACT à ses obligations en vertu du contrat. Par contre, l’exercice de ce droit par le CHU est conditionnel à l’envoi d’un préavis écrit de cinq jours. Dans l’éventualité où ce droit est exercé dans les conditions prévues aux contrats, TACT, à la suite de la résiliation du contrat, n’a droit qu’aux frais, déboursés et sommes représentant la valeur des services rendus à la date de résiliation, sans autre compensation ni indemnité.

 

Le tribunal était donc appelé à trancher si le CHU avait effectivement fait parvenir à TACT un préavis écrit de cinq jours au sens de l’article 13.03 b) du contrat. En effet, le contrat ne sera résilié de façon valable que si le CHU a donné un préavis écrit d’un délai de cinq jours informant TACT qu’à l’expiration de ce délai, le contrat sera résilié si elle ne remédie pas à son défaut de respecter l’une de ses obligations en vertu du contrat.

 

À la suite d’une rencontre lors de laquelle le CHU a discuté avec TACT de certains éléments qui étaient problématiques selon lui, il fait parvenir, le 14 janvier 2016, une lettre dans laquelle il mentionne qu’une période de probation de deux semaines est imposée à TACT et qu’après cette période, le CHU « devra prendre une décision quant à la poursuite ou à l’arrêt définitif du contrat. » Le tribunal était donc appelé notamment à déterminer si cette lettre constituait un préavis suffisant aux termes de l’article 13.03 b) du contrat.

 

Décision

Le CHU plaide que la lettre du 14 janvier 2016 constituait un préavis suffisant au terme du contrat. Le tribunal est cependant en désaccord avec cette position. En effet, selon le tribunal, cette lettre ne constitue pas un préavis écrit que le contrat sera résilié à l’expiration d’un certain délai si TACT ne remédie pas à son défaut de respecter ses obligations en vertu du contrat. Ainsi, celle-ci ne pouvait pas être considérée comme étant un préavis écrit tel que requis par la clause 13.03 b).

 

De plus, le tribunal se positionne aussi quant à savoir si la lettre imposant une période de probation à TACT pourrait être considérée comme étant une mise en demeure au sens du Code civil du Québec qui aurait potentiellement permis au CHU de résilier le contrat pour cause en vertu de l’article 1604 en raison d’une inexécution répétée qui n’est pas de peu d’importance. Selon la Cour, la lettre du 14 janvier 2016 ne peut être considérée comme une mise en demeure en vertu de l’article 1604 C.c.Q.

 

Ainsi, le tribunal parvient donc à la conclusion que le CHU a résilié illégalement le contrat. Selon la Cour, afin d’être considérée comme un préavis valide, la lettre du 14 janvier 2016 aurait dû mentionner de façon explicite que le contrat allait être résilié à l’expiration du délai. La période de probation de deux semaines ne pouvait donc dans ce contexte servir de préavis.

 

Conclusion

Cette décision vient donc réitérer qu’il est important pour un donneur d’ouvrage souhaitant résilier un contrat de service de s’assurer de fournir les avis requis en vertu du contrat, faute de quoi, il pourrait se voir condamné à indemniser le prestataire de service.


 

1. Theodore Azuelos consultants en technologies (TACT) inc. c. CHU de Québec - Université Laval, 2020 QCCS 1793.

Pour questions ou commentaires, vous pouvez joindre Me Antoine Gamache par courriel au agamache@millerthomson.com ou par téléphone au 514 879-4090.

 

 

Miller Thomson avocats

 

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Cet article est paru dans l’édition du 20 aout 2020 du journal Constructo. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous.