CHU de Québec : Des maquettes grandeur nature

20 décembre 2016
Par Léa Méthé Myrand

Le nouveau complexe hospitalier du CHU de Québec est conçu suivant l’approche LEAN, dérivée de la méthode Toyota. Pour optimiser l’espace intérieur, l’équipe de conception a testé l’occupation de plusieurs pièces standard à l’aide de maquettes en taille réelle.

Afin de concevoir l’hôpital le mieux adapté possible aux conditions de soins projetées jusqu’en 2031, le ministère de la Santé a opté pour une approche de design concertée. Ainsi, plus de 1 200 membres du personnel voués à travailler au nouveau complexe hospitalier, des directions de départements aux cliniciens, en passant par les préposés et les brancardiers, participent au design de leur futur lieu de travail. Le budget prévu pour la rénovation de l’Hôpital de l’Enfant-Jésus et la construction de deux nouveaux immeubles le long du boulevard Henri-Bourassa est de presque deux milliards de dollars.

 

Empruntée au constructeur automobile japonais Toyota, la méthode LEAN consiste à consulter toutes les personnes qui interviennent dans une chaîne d’opérations, afin d’optimiser leurs gestes et leurs parcours. Appliquée à la construction, LEAN promet de modeler l’environnement autour des opérations qui ont lieu à l’intérieur. « L’objectif est d’orchestrer les soins les plus efficaces possible, puis de bâtir les murs autour », explique Luc Gagnon, directeur associé à la direction clinique du nouveau complexe hospitalier (NCH). Aucun volume ni aucune superficie ne sont donnés à l’avance, sauf pour référence. C’est le résultat des ateliers de consultation qui détermineront le design final.

 

L’utilisation des maquettes en taille réelle visait à déterminer les superficies et configurations idéales de plusieurs pièces standard. L’exercice a eu lieu au printemps 2016, lors de six séances réunissant 40 personnes et d’une opération portes ouvertes. Il concernait des locaux qui seront reproduits des dizaines de fois chacun : chambre d’une unité de soins, chambre de soins intensifs, espace civière de l’urgence, salles d’examen général et spécialisé. L’objectif des ateliers : prévoir juste ce qu’il faut d’espace pour pouvoir accueillir de manière confortable et sécuritaire toutes les situations envisageables : le lever et la toilette du patient, la visite des proches ou l’examen au chevet par un médecin spécialiste. Les évènements plus rares, comme la réanimation, doivent aussi être anticipés.

 

« On commençait généralement les mises en situation avec un espace délibérément trop petit, explique Claire Huot, conseillère clinique. On déplaçait ensuite les murs en fonction des besoins et des préférences de chaque intervenant. Par exemple, l’ORL et le gynécologue se présentent tous deux avec un chariot pour leur matériel, mais ces derniers sont positionnés différemment dans la pièce. »

 

Le personnel a donc pu tester et manipuler librement les maquettes ainsi que l’équipement médical et le mobilier afin d’arriver aux mesures idéales. Les architectes du consortium AES ont transposé minutieusement toutes les mesures et noté les considérations de chacun afin de valider que les hypothèses demeurent cohérentes avec le code, la présence des réseaux électriques et de plomberie et les aires de manoeuvre des différents équipements. L’exercice permet-il de fixer le plan définitif de chaque pièce ? « Il y aura peut-être des compromis à faire, dit Claire Huot. Mais ce sera la référence pour ce qui doit être reproduit, afin d’informer la prise de décision et de trouver des compromis. »

 

Conception intégrée

Bien sûr, la conception du mégahôpital ne s’est pas amorcée avec l’aménagement des chambres. L’approche LEAN débute avec l’élaboration d’un ensemble de principes qui doivent guider la prise de décision par la suite. Ainsi, on a d’abord imaginé l’établissement de soins idéal où les besoins de tous les intervenants seraient comblés sans délais ni frictions. Les lunettes roses ont par la suite été enlevées lors du troisième atelier, qui consistait à faire une hiérarchie des besoins. Le travail de modelage des espaces a alors pu démarrer.

 

Le futur établissement sera organisé autour de trois édifices majeurs : le pôle ambulatoire, le pôle critique, et le Centre intégré de cancérologie.Photo de CHU de Québec/Université Laval

 

Dans le cas du CHU, la fusion des hôpitaux de l’Enfant-Jésus et de l’Hôtel-Dieu détermine la gamme des services et soins qui seront prodigués. Dans ce cadre, l’atteinte des normes de construction en vigueur et les projections de l’évolution des besoins en santé sont déterminantes. L’ensemble des acteurs étant soucieux de minimiser les déplacements des professionnels comme des patients, l’atelier a abouti sur un diagramme des départements mettant en évidence les liens de proximité à prioriser.

 

Par ailleurs, la superficie cumulée des deux blocs opératoires, bonifiée pour combler les besoins futurs, atteignait presque la taille du Centre Bell. La longueur des trajets que cela occasionnerait a démontré la pertinence de l’exercice d’optimisation. L’hypothèse de travail retenue prévoit, entre autres, l’aménagement du bloc sur deux étages, pour profiter des circulations verticales.

 

Depuis août 2016, la volumétrie du campus se précise : l’établissement sera organisé autour de trois volumes distincts. Le pôle ambulatoire sera aménagé dans les locaux existants de l’Enfant-Jésus. Le pôle critique sera implanté juste au nord, le long du boulevard Henri-Bourassa. Enfin, le Centre intégré de cancérologie sera situé dans le prolongement de l’immeuble précédent, jusqu’à longer la 18e Avenue.