22 juillet 2013

La récupération et le recyclage des débris de chantier s’imposent plus que jamais dans le secteur du bâtiment, au premier chef lors de la réalisation de projets LEED. D’où l’importance de savoir y faire pour les entrepreneurs.

Par Rénald Fortier

 

Récupération et recyclage : voilà deux mots que les entrepreneurs du milieu du bâtiment ont tout intérêt à intégrer à leur vocabulaire courant. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils sont de plus en plus souvent appelés à détourner de l’enfouissement les débris de construction, surtout dans le cadre de projets visant l’obtention de la certification LEED.

 

C’est que dans le cadre d’un projet LEED, tous les crédits dont l’obtention est ciblée au départ sont importants ; ceux liés à la gestion des matières résiduelles – il est possible d’en récolter jusqu’à trois en déviant au moins 95 % des débris de l’enfouissement – ne faisant pas exception. Car un point de gagné ou perdu peut faire toute la différence entre l’atteinte ou non du niveau de certification escompté, voire à la limite entre l’obtention ou pas de la certification.

 

Et c’est à l’entrepreneur général qu’incombe la responsabilité d’obtenir les points LEED rattachés à la gestion des rebuts de chantier. Il a donc tout intérêt à savoir y faire pour les récupérer, ainsi que pour s’assurer qu’ils seront bel et bien dirigés vers la filière du recyclage. Ou encore, selon le cas, vers celle de la valorisation.

 

Gilles Bessette - Photo de René-Claude Senécal

 

Gilles Bessette peut aisément en témoigner. Coordonnateur LEED chez Pomerleau, il donnera sous peu un séminaire LEED à l’intention des entrepreneurs. Un cours qui, offert par la Section du Québec du Conseil du bâtiment durable du Canada, abordera notamment la question des matières résiduelles. « C’est un incontournable, dit-il. Dans tous les projets visant la certification, il y a toujours des crédits à aller chercher du côté de la récupération et du recyclage des rebuts de chantier.

 

« C’est donc une tâche que les entrepreneurs généraux doivent nécessairement apprendre à bien maîtriser, poursuit-il. C’est la même chose pour leurs sous-traitants, car ils devront s’assurer de satisfaire les exigences établies à l’égard de la disposition des débris tout au long du déroulement d’un chantier. »

 

Aux yeux de cet habitué des projets LEED où les taux de détournement se situent plus souvent qu’autrement au-dessus de 90 %, il n’y a rien de bien sorcier à récupérer les rebuts de construction et à voir à ce qu’ils soient recyclés. Du moins si l’on prend la peine de bien planifier la démarche, notamment en évaluant les quantités de matériaux à récupérer, et que l’on informe dès le départ les sous-traitants de la marche à suivre. Non sans veiller du début à la fin à ce qu’ils respectent les consignes à la lettre, à plus forte raison si différents conteneurs sont installés sur le chantier pour permettre la ségrégation des matières.

 

Faire affaire avec un centre de tri

La première chose à laquelle voit Gilles Bessette au moment d’aborder un nouveau projet LEED, c’est toutefois de s’assurer que le centre de tri qui traitera les matières résiduelles issues du chantier pourra lui fournir tous les documents nécessaires aux fins de la certification. « Je ne peux pas faire affaire avec un transporteur qui est incapable de me remettre les bons de pesées au moment où j’en ai besoin. Comme je dois transmettre un rapport mensuel à l’architecte pour lui indiquer où on en est, il me faut obtenir l’information tous les mois, sinon toutes les deux semaines. »

 

L’expert de Pomerleau doit également connaître la destination de chacune des matières une fois qu’elles ont été triées, preuves à l’appui. Il lui faut donc obligatoirement obtenir un rapport indiquant où va le bois, le gypse, l’acier, etc. Et attestant aussi que les matières ont bel et bien été recyclées.

 

Thierry Deruelle - Photo de René-Claude Senécal

 

Directeur général de Mélimax, Thierry Deruelle sait très bien de quoi il retourne. Cette entreprise de Châteauguay spécialisée dans le transport et le tri des matières résiduelles a été appelée à ce jour à participer à plusieurs projets LEED, dont une quinzaine de chantiers majeurs déjà terminés ou en cours. Comme ceux de la Maison du développement durable, du Planétarium Rio Tinto Alcan, du Centre intégré de cancérologie de la Cité de la Santé de Laval ou du Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal.

 

« C’est sûr qu’il faut développer une expertise particulière pour servir un entrepreneur oeuvrant sur un projet LEED, indique-t-il. Nous devons assurer un suivi de la réception du conteneur jusqu’à la valorisation des résidus récupérés, soit démontrer la traçabilité la plus complète possible des intrants et des extrants de la partie logistique de retour sur le chantier. Car plus l’entrepreneur peut démontrer qu’on valorise les matières dans les bonnes filières, plus son client est susceptible d’obtenir ses points LEED. »

 

C’est pourquoi l’équipe de gestion des projets LEED de Mélimax leur fournit un relevé détaillé toutes les deux semaines ou chaque mois. Ce rapport indique le pourcentage de chaque matière contenue dans chacun des conteneurs réceptionnés, information qui est ensuite consolidée dans un seul projet. Outre cette caractérisation, il fait aussi évidemment état de la disposition des matières.

 

« Un projet LEED demande plus de documentation et de rigueur, observe Thierry Deruelle, car il faut être en mesure de fournir l’information requise par l’entrepreneur. Nous, nous sommes capables d’intégrer ces exigences à nos activités parce que nous contrôlons la chaîne d’approvisionnement de A à Z puisque nous voyons à la fois au transport, au tri et à la valorisation des matières. »

 

Pour Gilles Bessette, il est clair que la multiplication des projets LEED fait en sorte que les entrepreneurs n’auront d’autre choix que de chercher à détourner les résidus de construction de l’élimination et que les centres de tri, voire aussi les transporteurs, devront être en mesure de les soutenir dans cette démarche. « Au début, conclut-il, il y a un apprentissage à faire. Mais lorsque l’on sait comment faire, ce n’est pas du tout compliqué. D’ailleurs, chez Pomerleau nous voyons désormais à la récupération des débris de construction sur tous nos chantiers, même lorsqu’ils ne visent pas LEED. »