L’entretien des équipements : un investissement à long terme

4 juin 2021
Par Jean Garon

Les équipements roulants et de chantier constituent l’une des principales ressources sur lesquelles un entrepreneur en construction compte pour réaliser sa mission. C’est le poste de dépenses dans lequel il met le plus d’argent après les ressources humaines. Il est donc dans l’ordre des choses qu’il y prête la plus grande attention en veillant à bien les entretenir.

Voilà en résumé ce que nous a confié en entrevue Jean-Bruno Lapointe, président de Globaction Management, une entreprise de Saint-Jean-sur- Richelieu spécialisée en gestion d’entreprise et de chaines d’approvisionnement.

 

De prime abord, il précise qu’un entrepreneur peut posséder des équipements pour plusieurs raisons, dès lors qu’il peut en justifier l’usage pour au moins 50 pour cent (%) de ses affaires. « Les usages et la fréquence d’usages de ses équipements sont deux facteurs qui pèsent dans la balance. À cela s’ajoute la criticité des travaux à exécuter au bon moment. » D’où l’importance de pouvoir compter sur des équipements bien entretenus, en bon état et sécuritaires pour oeuvrer sur des chantiers de construction et faire de bonnes affaires.

 

Si l’entrepreneur oeuvre en excavation, terrassement, voirie et génie civil, par exemple, il a besoin de machineries diverses, de camions, de remorques de transport et d’autres équipements. Il en va de même pour des entreprises spécialisées en bâtiment, que ce soit pour de la charpenterie, de la maçonnerie, de la plomberie ou des travaux d’électricité. En fait, chaque entrepreneur spécialisé a recours à une variété d’équipements pour exécuter le travail pour lequel il s’est engagé par contrat.

 

Certes, il est toujours possible de louer des équipements ou de sous-traiter les travaux qui en nécessitent, comme le forage d’un tunnel, l’usage d’une grue mobile ou d’une pompe à béton de grande portée et capacité. Mais ça ne devrait pas être le cas pour des équipements d’usage commun et fréquent, question de pouvoir disposer de ces équipements quand l’entrepreneur en a besoin, sans dépendre d’un fournisseur. D’autant plus que la location lui coûtera 30 % plus cher, avec le risque d’une indisponibilité ou d’être moins compétitif sur le plan contractuel.

 

L’incontournable dilemme des dépenses d’entretien

Le spécialiste en gestion estime qu’une entreprise qui n’assure pas un entretien convenable de ses équipements n’est pas avantagée. Pour lui, le calcul est simple à faire. « Ce qui coute cher, lorsqu’il survient des pannes ou des bris mécaniques en chantier, faute d’entretien, ce n’est pas seulement le cout de la réparation. C’est en plus un investissement à supporter qui n’apporte pas de revenus à l’entreprise pendant tout le temps que cet équipement n’est plus disponible pour exécuter des travaux. »

 

Jean-Bruno Lapointe, président de Globaction Management. Crédit : Gracieuseté

 

À 200 dollars et plus de l’heure facturable, la perte de revenus qu’engendre cet équipement immobilisé grimpe vite. Elle peut même atteindre plusieurs milliers de dollars si l’équipement défectueux paralyse un chantier de plusieurs travailleurs. En réalité, cette perte peut même représenter des dizaines voire des centaines de milliers de dollars.

 

La question qui se pose alors : l’entreprise est-elle en mesure de faire l’entretien de ses équipements à l’interne ou faut-il qu’elle en confie le soin à l’externe? La réponse est moins simple. Ça vaut la peine que l’entreprise s’en occupe elle-même si le parc d’équipement a une certaine valeur ou s’il est stratégique pour la mission de l’entreprise. Surtout dans une optique préventive qui limite les interventions correctives d’urgence susceptibles de la priver de revenus et à condition de veiller au grain sur le plan comptable.

 

Différents types de gestion des équipements Dès le départ, Jean-Bruno Lapointe fait valoir le rôle stratégique de l’entretien des équipements pour une entreprise. Cette activité de maintenance consiste à « effectuer diverses opérations qui permettent de conserver le potentiel du matériel pour assurer la continuité et la qualité de production ainsi que la sécurité d’opération ».

 

Il distingue deux principaux types d’entretien : l’entretien correctif pratiqué après une panne ou un bris mécanique, et l’entretien préventif effectué pour prévenir les pannes, l’usure prématurée et les bris. L’un et l’autre impliquent diverses interventions, soit en urgence avec perte de productivité dans le premier cas, soit à partir d’un calendrier établi en dehors des quarts de travail sans restreindre la production dans le deuxième cas.

 

Dans l’entretien correctif, qui survient souvent lors d’un arrêt d’équipement, l’intervention peut être provisoire pour assurer son dépannage, ou nécessiter une réparation avec immobilisation de l’équipement. Il peut supposer aussi l’ajout d’amélioration pour la suppression ou la diminution des pannes. Jean-Bruno Lapointe affirme que c’est le type d’entretien qui est généralement fait sur les chantiers. « L’équipement se brise ou tombe en panne, puis on le répare. »

 

L’entretien préventif suppose une structuration et une planification des interventions. Elles peuvent se faire sur la base de routines de surveillance, d’ajustements et de corrections mineures; d’automaintenance par les opérateurs de l’équipement; sur une base périodique en fonction du temps ou des cycles de fonctionnement; ou de façon systématique pour les composantes critiques d’un équipement suivant leur durée de vie et caractéristiques de fiabilité; ou encore en mode conditionnel suivant des mesures ou signaux révélateurs de l’état de dégradation (analyses prédictives des huiles, des vibrations, de thermographie).

 

Le spécialiste estime que c’est l’approche la plus avantageuse pour réduire les couts de réparation et pertes de revenus, pour rehausser la productivité de l’entreprise, en plus d’améliorer la sécurité des travailleurs et prolonger la durée de vie de l’équipement. Qui plus est, l’implantation d’un programme d’entretien préventif permettra de colliger une foule de données sur chaque équipement utilisé. Des données qui fourniront une meilleure vue d’ensemble de l’état des équipements de l’entreprise, lui permettant du même coup d’anticiper et de planifier ses investissements pour leur remplacement éventuel. Il assure qu’un investissement en entretien préventif se rentabilise en moyenne sur une période d’une année ou deux.

 

Moins une dépense qu’un investissement…

Selon lui, il n’y a pas de doute quant à la rentabilité de l’exercice dans la balance comptable. Les économies générées sont beaucoup plus importantes que les couts de développement d’un service d’entretien préventif maison. Dépendamment de la façon de les comptabiliser. Une dépense faite pour améliorer un équipement, donne-t-il comme exemple, n’est pas qu’une dépense; ça peut être aussi un actif dans le bilan. « Malheureusement, bon nombre d’entreprises mettent toutes les dépenses d’entretien dans le même panier. Cette situation amène l’entreprise à prendre des décisions basées sur des mauvais indicateurs.

 

Si ses intrants ne donnent pas une bonne vision de la réalité, c’est comme si l’indicateur du niveau d’essence de l’équipement donnait une indication de sa température dans le tableau de bord. » Quand on parle d’entretien de l’équipement, il est donc plus payant de penser à long terme et d’envisager les interventions en termes d’investissement que de considérer les dépenses immédiates.