Prévenir les risques d’accidents en espace clos

29 septembre 2021
Par Mathieu Ste-Marie

Chaque année, près de 40 Québécois sont victimes d’accidents graves ou mortels lorsqu’ils travaillent en espace clos. Or, plusieurs de ces événements pourraient être évités si les travailleurs savaient mieux reconnaitre ces lieux et les risques qui y sont associés.

Bernard Teasdale le sait très bien : un grand nombre d’accidents se produisent alors que le travailleur ignore qu’il est dans un espace clos pour effectuer une inspection, un nettoyage ou un entretien. C’est pourquoi au début de chacune de ses formations en entreprise, le conseiller en prévention pour l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail de la construction (ASP Construction) prend plusieurs minutes afin de bien définir l’espace clos et ses caractéristiques.

 

Pour ce faire, le formateur s’appuie sur le Code de sécurité pour les travaux de construction qui définit ces lieux comme étant un espace qui n’est pas conçu pour être occupé par une personne, notamment un réservoir, un silo, une cuve, un caisson, un pieu de fondation, une cheminée ou un puits d’accès.

 

Quatre caractéristiques principales accompagnent cette courte définition :

  1. un travailleur peut entrer dans l’espace;
  2. l’espace n’est pas un poste de travail;
  3. les accès sont restreints;
  4. l’espace présente des risques pour la santé et la sécurité du travailleur.

Après avoir donné cette définition, le formateur peut ensuite aborder avec ses élèves les risques qui sont nombreux et parfois fatals. « Les travailleurs peuvent être exposés à toutes sortes de dangers, par exemple, le risque de chute, le cadenassage, les problèmes respiratoires, le risque biologique. Ces risques sont variables d’un endroit à l’autre. C’est pourquoi les travailleurs gagneraient à suivre une formation pour chacun d’entre eux », explique le conseiller en prévention.

 

Bernard Teasdale, donseiller en prévention pour l’Association paritaire pour la santé et la sécurité du travail de la construction (ASP).. Crédit : Gracieuseté

 

Toutefois, certains dangers sont plus fréquents et plus grands que d’autres. En effet, une grande partie des accidents, dont certains mortels, sont de nature atmosphérique, c’est-à-dire qu’il y a une déficience en oxygène, du gaz et des vapeurs toxiques ou une atmosphère inflammable.

 

Un accident instantané

La Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) lance un avertissement : lorsque des dangers atmosphériques sont présents, un accident peut survenir instantanément avec une possibilité d’évitement pratiquement nulle.

 

Par exemple, une perte de conscience peut survenir en une ou deux respirations, tandis qu’une étincelle peut provoquer une explosion, ne laissant aucune chance aux travailleurs présents, précise la CNESST. Dans certains cas, les gaz ou les vapeurs toxiques agissent plus lentement et peuvent conduire à une perte de jugement ou à une confusion compromettant la capacité du travailleur à évacuer par lui-même l’espace clos.

 

Toutefois, il n’y a pas seulement les risques liés à l’espace clos, rappelle avec raison Bernard Teasdale. « Les dangers atmosphériques peuvent également être dus à la nature des travaux exécutés. C’est le cas par exemple d’un travailleur qui utilise des produits chimiques. »

 

Ne rien improviser

Devant ces risques majeurs, la meilleure arme réside dans la préparation. Rien ne doit être improvisé et une procédure doit être mise en place. D’abord, les travailleurs doivent, si possible, préparer l’espace clos de l’extérieur pour fermer et cadenasser des conduits afin d’empêcher une arrivée ou un retour de matières dégageant des gaz. De plus, avant de s’introduire dans ce lieu, le travailleur a grand intérêt à connaitre la concentration en oxygène. Lorsque celle-ci est inférieure à 19,5 pour cent, il est interdit d’entrer dans un espace clos.

 

À l’intérieur de ce lieu fermé, les risques atmosphériques peuvent être contrôlés, notamment grâce à la ventilation mécanique, au port de détecteur de gaz personnel et au port d’un appareil de protection respiratoire à adduction d’air.

 

Prêt pour le sauvetage

Si la situation tourne au vinaigre, les mesures de sauvetage doivent être immédiatement déployées. Encore là, une bonne préparation est de mise. « Il devrait toujours y avoir une méthode de sauvetage qui a déjà été testée. Il ne faudrait pas qu’à chaque fois qu’il y a un pépin, une équipe ne sache pas quoi faire et appelle le 911 », souligne le conseiller en prévention de l’ASP Construction.

 

De son côté, la CNESST rappelle que les accidents en espace clos font souvent plus d’une victime à cause des tentatives de sauvetage improvisées en l’absence d’un plan d’intervention. Selon cette organisation, les mesures de sauvetage devraient privilégier les moyens permettant une opération à partir de l’extérieur. Par exemple, avec une descente verticale, il est possible, à l’aide d’un trépied et d’un treuil, d’évacuer un travailleur. Dans ce cas le harnais qu’il porte doit demeurer relié au treuil.

 

Les responsabilités de chacun

Les mesures de sauvetage tout comme les méthodes nécessaires à l’exécution du travail doivent être élaborées par le maitre d’oeuvre et l’employeur. Toutefois, c’est loin d’être leurs seules responsabilités. Ils ont, entre autres, le mandat d’identifier par écrit les conduits et les tuyaux entrant dans l’espace clos ainsi que de noter les risques et les contaminants susceptibles d’être présents dans ou aux environs de ce lieu.

 

Puis, le plus important : ils doivent s’assurer de bien former leurs équipes qui, elles, ont le devoir de veiller à respecter les mesures de sécurité. De cette façon, les travailleurs pourraient être en mesure de mieux reconnaitre les dangers et, ainsi, réduire le risque d’accident.

 

LES RISQUES BIOLOGIQUES

Les accidents liés à l’atmosphère (déficience en oxygène, explosions et substances toxiques) sont les plus nombreux en espace clos, mais il existe aussi d’autres dangers importants, comme les risques biologiques qui sont à l’origine de plusieurs accidents. Une plaie mal cicatrisée, une coupure fraiche ou une éclaboussure au visage offre de nombreuses portes d’entrée aux micro-organismes qui peuvent causer entre autres des nausées, des infections respiratoires, l’hépatite A, le cancer. Règle générale, l’exposition aux agents biologiques est contrôlée lorsque l’on élimine les fines particules liquides en suspension dans l’air.

Parmi les autres dangers en espace clos, on note aussi la noyade, l’ensevelissement, l’écrasement, la chute, le choc électrique et la radiation.