5 avril 2021
Par Ruby Pratka

La construction du REM représente plus d’une vingtaine de chantiers à travers le Grand Montréal, incluant la voie centrale du pont Samuel-De Champlain. Il s’agira de l’un des réseaux de métro léger automatisés les plus imposants au monde.

Entrepris en 2018, il sera constitué de quatre antennes, principalement hors sol, qui seront intégrées aux services de transport collectif actuels. Quelque 2 000 ouvriers et professionnels s’y affairent présentement.

 

En juillet 2020, certains travaux ont dû être suspendus à la suite de la détonation d’une charge explosive datant de 1912, dans le tunnel situé sous le mont Royal. « Personne n’a été blessé, mais personne ne l’avait anticipé », souligne Jean-Vincent Lacroix, directeur Communication chez CDPQ Infra. À la suite d’une évaluation par la CNESST, l’excavation s’est poursuivie avec des robots contrôlés à distance. Autre tuile : pendant les travaux, on a constaté une dégradation structurelle de l’acier et du béton du tunnel en raison de l’infiltration d’eau et de sels déglaçants.

 

Les travaux de renforcement du tunnel jumelés aux effets de la COVID-19 – en plus de la mise en place de mesures sanitaires, la fermeture des frontières a retardé l’arrivée de certains équipements et d’équipes spécialisées – ont entrainé le report de l’échéancier, a-t-on annoncé en novembre.

 

Ainsi, le tronçon Gare Centrale-Brossard devrait voir son premier départ en 2022, la partie centrale (entre la Gare Centrale et la station Du Ruisseau) à l’automne 2023 et les tronçons vers Anse-à-l’Orme et Deux-Montagnes au cours de 2024. L’effet des travaux additionnels sur le budget prévu de 6,5 milliards de dollars (G$) n’a toutefois pas encore été comptabilisé.

 

« Nous avons une trentaine de chantiers, 24 stations et plus de 11 km de rails sous construction. Le terminus Rive-Sud sera livré au cours de 2021, et nous sommes dans la période des tests, avec des voitures qui y circulent déjà », rapporte le porte-parole.

 

Destination YUL

Si le projet d’un tronçon additionnel de 22 km de Brossard vers Chambly et Saint-Jean-sur-Richelieu a été abandonné, le segment vers l’aéroport est finalement bien en selle et devrait entrer en service à la fin de 2024.

 

L’immense tunnelier Alice, véritable usine mobile qui construit le futur tunnel entre l’Arrondissement de Saint- Laurent et Montréal-Trudeau, a commencé à creuser à l’automne 2020. Cette machine de 100 mètres (m) de long fore un tunnel de plus de sept mètres de diamètre tout en construisant ses parois. « C’est toute une bête ! », s’enthousiasme Jean-Vincent Lacroix.

 

Le tunnelier Alice a permis de creuser un tunnel de 3 km entre la Station Marie-Curie du REM, dans le secteur Technoparc, et l’aéroport Montréal Trudeau. Photo :  REM/NOUVLR

 

La fréquence des trains, d’une capacité de 600 passagers, sera de 10 et de 15 minutes aux heures de pointe et hors pointe, respectivement – comparativement à 2 minutes 30 pour le reste du réseau – et le trajet promet d’être relativement court. À titre d’exemple, le parcours sera de 21 minutes à partir de la station Édouard-Montpetit et de 25 minutes de la Gare Centrale.

 

Le REM de l’est

Bien que le projet du REM de l’Est, dévoilé en décembre 2020, utilisera la même technologie que le REM initial, il s’agit d’un projet séparé, avec un budget de 10 G$, l’investissement le plus important dans un seul projet dans l’histoire du Québec.

 

En 2019, quatre ans après le dévoilement du REM initial, CDPQ Infra a été mandatée par Québec pour étudier l’idée d’un réseau dans l’est de la ville, mal desservi par les réseaux de transport existants, explique Virginie Cousineau, porte-parole pour le REM de l’Est. Le nouveau tracé inclut également Montréal-Nord; un prolongement vers Laval est par ailleurs à l’étude.

 

Virginie Cousineau souligne que, début 2021, le REM de l’Est est à l’étape de la planification et de la consultation. La construction devrait être lancée en 2023, soit à la suite du processus de consultation du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE). Sa mise en service est prévue pour 2029.

 

Le projet ne tombe pas sous le mandat de NouvLR, le consortium mandaté pour construire le REM initial; des appels d’offres séparés pour la construction et le matériel roulant devraient être lancés en 2022. Pour ce qui est du volet ingénierie, un consortium formé de Systra et Aecom a déjà été sélectionné.

 

À CONSULTER

 

La construction s’annonce complexe, avec un grand tracé aérien. « On a regardé la possibilité d’aller en souterrain, mais il y a énormément de défis techniques par rapport à toutes les infrastructures enfouies », indique Virginie Cousineau.

 

Un processus de consultation publique dans les quartiers touchés devrait également s’amorcer en avril. « Le projet est perfectible. Si des gens constatent qu’on devrait modifier des éléments, on veut être à l’écoute », poursuit la porte-parole. D’ici la fin de l’année, elle envisage d’avoir « un projet architectural qui va susciter la fierté de tout le monde. »

 

Le projet vise à transformer l’est de Montréal. « C’est monumental. On dessert des secteurs qui n’ont jamais été desservis par un réseau structurant », fait valoir Virginie Cousineau. Le REM de l’Est traversera environ 2,5 millions de mètres carrés de terrains vacants, qui deviendront vraisemblablement plus attractifs auprès des constructeurs une fois le REM mis en service.

 

Un projet colossal

Selon Virginie Cousineau et Jean-Vincent Lacroix, les retombées pour l’industrie de la construction s’étendront bien au-delà de la mise en service des trains, avec plus de 30 000 emplois directs et indirects créés au cours de la construction, qui devrait se terminer en 2029. « C’est un projet à l’échelle de la Baie-James, et il n’y a aucun corps de métiers qui n’est pas touché, note Jean-Vincent Lacroix.

 

« Il y a une grande variété de travail, et normalement il faudrait qu’un travailleur aille ailleurs pour avoir toute cette expérience. Un de nos objectifs est de développer un corps d’experts québécois et de montrer qu’on peut financer des projets, mais qu’on peut aussi les construire. »

 

ALICE, LA MERVEILLE

L’objectif était de creuser un tunnel entre le Technoparc et l’aéroport Montréal-Trudeau, en raison de la présence de milieux humides et des pistes de l’aéroport. Pour ce faire, on a retenu les services d’une machine hors norme, très sécuritaire et plus rapide que n’importe quel autre engin similaire.

Prénommé Alice, le tunnelier – livré en pièces détachées dans une soixantaine de camions, puis assemblé, il comporte un équipage d’une dizaine de travailleurs – fore, évacue les déblais et pose des voussoirs pour former un anneau étanche. Il s’agit d’une première à Montréal, la construction du métro ayant été réalisée par forage et dynamitage.

 

ALICE EN BREF
  • Fournisseur : The Robbins Company (Ohio, É.-U.)
  • Longueur du tunnelier : 100 m
  • Longueur du tunnel : 3 km
  • Profondeur du puits de départ au Technoparc : 12 m
  • Profondeur à l’aéroport : 35 m
  • Diamètre d’excavation : 7,38 m
  • Vitesse : 1,70 m/heure (soit un anneau)