23 juillet 2014
Par Rénald Fortier

À la tête du ministère des Transports avril 2014, Robert Poëti a vite eu à faire certains choix importants. État de la situation.

Les dés sont maintenant tombés. Québec injectera près de 4,9 milliards de dollars dans l’entretien, l’amélioration et le développement du réseau routier pour la période 2014-2016, un recul de 800 millions comparativement au budget de travaux annoncé par son prédécesseur pour 2013-2015. Et encore plus par rapport aux sommes massives consacrées au redressement du réseau dans les cinq années antérieures.

 

« Non, on ne marque pas un retour à la hausse. Mais les projets qu’on identifie, on va les faire. Ce n’est pas juste de les placer sur un tableau, ou un calendrier, et ne pas les réaliser. L’investissement est quand même majeur ; on parle de 4,9 milliards. Ça aurait pu être plus bas et on aurait été capable de l’expliquer (…), compte tenu du déficit du Québec », indique d’entrée de jeu le ministre des Transports, Robert Poëti, lors d’un entretien avec Constructo.

 

Il note qu’il fallait aussi prendre en compte le déficit du maintien des actifs deux fois plus élevé dans le transport collectif. C’est pourquoi il a maintenu le milliard de dollars qui avait été transféré de ce côté par le gouvernement précédent, l’an dernier, à partir du budget dévolu aux travaux routiers.

 

Aux yeux de Robert Poëti, il est clair que les investissements consentis pour l’exercice 2014-2015 permettront de poursuivre le rattrapage amorcé il y a une dizaine d’années sur le réseau. Et que l’on continuera dans cette voie avec les 20,4 milliards de dollars de travaux routiers inscrits au Plan québécois d’infrastructures 2014-2024.

 

Les 4,9 milliards à investir sur la période 2014-2016 se traduiront par la poursuite ou le démarrage de plus de 2 000 chantiers un peu partout au Québec. La majeure partie de cette somme, soit plus de 3,2 milliards, sera dirigée vers la conservation des structures et des chaussées.

 

« Comme la sécurité routière, qui figure au sommet de nos priorités, le maintien des actifs, c’est une clé pour nous. Parce que réinvestir dans des structures qui en ont besoin, ça coûtera pas moins cher si on attend un an ou deux ans. On doit sauvegarder ce patrimoine essentiel à la bonne marche de l’économie », signale le ministre.

 

Cette année, ce sont 1 475 appels d’offres qui figurent à la programmation de Transports Québec. Le processus de publication accuse toutefois un certain retard, comme le précise Robert Poëti : « On a peut-être perdu un mois parce que c’est la réalité d’aller en élections et d’attendre, après coup, que le nouveau gouvernement dépose le budget. On doit maintenant rattraper. »

 

Voie d’évitement

Par ailleurs, Robert Poëti a aussi fait son nid dans le dossier portant sur la transformation de son ministère en une agence des transports, cette dernière étant dirigée sur une voie d’évitement. Parce que pour lui, il y a une nette différence entre l’Agence du Revenu et celle projetée pour des transports, la première embauchant des ressources lui permettant d’aller chercher un montant d’argent multiplié par rapport à l’investissement.

 

« Moi, je n’ai pas de revenus ici, dit-il. Alors, en ce qui me concerne, je n’irai pas dépenser de l’argent actuellement pour déménager des gens dans une autre bâtisse ou juste garder la même bâtisse et changer de nom. Honnêtement, je pense que dans le contexte économique actuel, le coût relié à ça pour le bénéfice que ça va rapporter n’en vaut pas la chandelle. »

 

Et l’objectif de dépolitiser la route qui était visé par la création de cette agence ? « Je pense qu’il y a déjà pas mal de choses pour dépolitiser l’ensemble de l’oeuvre, répond-il. Ça s’appelle, l’UPAC, les codes d’éthique, les enquêtes, les unités de surveillance. »

 

Robert Poëti souligne que le ministère va retrouver toute son expertise, en embauchant davantage d’ingénieurs, qu’il participera aussi avec le gouvernement à une restructuration des dépenses et qu’il augmentera l’efficacité de ses ressources pour faire mieux avec les moyens à sa disposition. « Il faut assurer les citoyens que l’efficience, ça touche l’ensemble de l’oeuvre, précise-t-il.

 

Nous allons donc revoir nos méthodes de travail, notre façon de traiter les dossiers et de traiter les priorités. « Nous allons aussi participer avec le gouvernement à une restructuration des dépenses et augmenter notre efficacité pour faire mieux avec ce qu’on a. Je suis convaincu que le ministère a la capacité de faire le travail. Et déjà il le démontre dans plusieurs dossiers où on réalise des économies importantes sur des grands chantiers. »

 

Si le ministère des Transports a prêté flanc à la collusion et la corruption par le passé, comme l’a démontré la Commission Charbonneau, son titulaire assure que l’organisation est aujourd’hui mieux préparée à y faire face. Il précise : « Des gens de l’UPAC sont passés par ici, Jacques Duschesneau a fait un excellent travail et la loi sur les infrastructures nous donne maintenant un processus très clair sur la façon avec laquelle on doit traiter les grands dossiers. Il y a des moyens qui ont été mis en place. »

 

Aussi, dès son arrivée en poste, il a rencontré les sous-ministres pour les aviser que si des employés du ministère avaient des doutes sur des pratiques, ils pourraient les exposer. Et qu’ils seraient non seulement bien reçus, mais qu’ils pourraient également s’exprimer en toute confidentialité. « Souvent, le crime organisé, ou les gens qui font de la corruption ou de la collusion, c’est comme les mauvaises herbes, illustre-t-il ; on les arrache, mais ça repousse. Il faut donc toujours demeurer très vigilant. »

 

C’est pourquoi Robert Poëti s’affaire actuellement à donner au ministère de nouveaux outils permettant de détecter des situations susceptibles de se révéler problématiques à cet égard. « Il a déjà eu des rencontres de formation avec l’UPAC pour exposer aux gestionnaires et aux sous-ministres comment peut s’infiltrer le crime organisé, indique-til. On va poursuivre dans cette voie pour que nos ressources puissent être en mesure d’identifier les gens qui sont mal intentionnés. » Pour lui, il ne fait pas de doute que le présent et l’avenir du ministère des Transports tiennent désormais à ces mots : intégrité, transparence, efficacité, expertise.

 


Cet article est tiré du Supplément thématique – Infrastructures et grands travaux 2014. Pour un accès privilégié à l’ensemble des contenus et avant-projets publiés par Constructo, abonnez-vous !